jeudi 25 décembre 2008

NEDELEG GLAOUEN !!

et Joyeux Noël aux non-bretonnants, ils l'ont bien mérité aussi...

Ici c'est délices montagnards et joies de la glisse au soleil, j'espère que pour vous tous aussi !!

bien des bises et tous mes voeux de douceurs et merveilles post-, inter- et pré-réveillonnesques.

vendredi 12 décembre 2008

appel pour le livre

c'est que vous pourrez lire puis signer l'appel pour le livre...

Merci d'avance, pour la littérature, la liberté et tout ce qui va avec : la vie.

jeudi 11 décembre 2008

c'est déjà jeudi !

je suis verte, déconfite et pas fière de moi du tout : hier j'ai dit à ma blogueuse préférée que je raconterai la suite de mon épopée lutécienne, j'envisageais même d'y passer une partie de la soirée, après avoir assouvi tous les désirs de ma maisonnée - bien que je les dresse régulièrement à l'autonomie, ils ont une fâcheuse tendance à la dépendance maternelle autant que conjugale !

me voici donc à reprendre le fil un jeudi soir, ce qui ne cadre pas du tout avec mes projets de voir enfin "Lost in Translation" que j'ai déjà raté en vrai les semaines qui ont suivi sa sortie.

Ah oui, j'avais oublié de vous dire que je suis allergique au petit écran, ça me donne à la fois des rougeurs très vilaines sur le visage et des crampes dans l'arrière-train qui ne s'estompent qu'après moult massages appropriés - mon prince charmant étant régulièrement absent, je n'ose plus m'aventurer seule face aux méfaits cathodiques.

Mais ce soir, pour connaître enfin ce chef d'oeuvre, parce que je tiens Sofia Coppola en haute estime et que j'ai savouré Bill Murray dans Broken Flowers de Jarmusch (rôle de looser qui part à la recherche de son enfant en rendant visite à ses anciennes amours...)... je vais faire un effort !

et il va bientôt être l'heure, donc désolée... mais ce sera pour un autre fois, les histoires de Tour bleutée et de tapis rouges ...

lundi 8 décembre 2008

mon week-end de Bécassine

bon, alors y en a qui ont dit qu'on pourrait en faire un post, de cette escapade à la capitale, donc voilà, c'est un bout de ce que j'en ai retenu... mais pour faire vite alors, parce que c'est pas le tout mais la compta n'attend pas...

donc il y a d'abord eu le train. Non, avant encore, la veille, la préparation du départ - et oui, même pour une absence de deux jours, il y a des êtres, des objets et des actes qui réclament mon attention, ma concentration et mon énergie. et donc voilà ce que ça a donné dans ce wagon de 2nde classe, direction Paris :

OK, c’est bon, c’est reparti, mon bel ibook a repris ses couleurs, une petite cure d’énergie en câble et le revoilà paré à me soutenir, me supporter plus exactement…

Il m’aura quand même fait une belle frayeur en refusant de s’allumer au beau milieu d’un jour où l’inspiration se faisait pressante, hallucinante presque par sa prégnance et son insistance à me harceler de mots, d’idées, de situations qu’il faudra maintenant retrouver aux tréfonds de mes neurones un peu ensevelies à présent sous d’autres couches de pensées et lectures.

Et je ne parle pas des nuits, moments fugaces et pourtant bien longs, où les phrases ont surgi une à une, les mots s’alignaient, je les tapais en pensée et les relisais pour tenter de les apprendre, empoignée que j’étais par cette flemme terrible de m’extirper de la chaleur douce de la couette pour coucher encre sur papier…

Il me faudra dire ainsi, en désordre ou comme ça me revient :
Les couleurs des arbres et du ciel en roulant dans la campagne après l’averse d’automne : les nuages coléreux froncent les sourcils et donnent aux chênes une lumière presque frémissante de hargne, on dirait les verts prêts à prendre les armes pour combattre ces gris-noir massifs qui n’en finissent pas de se disputer avec les rayons pour accaparer la meilleure place dans le tableau. Lumière, ombres, palette d’artiste énervé, j’ai ressenti Gauguin à Tahiti sous les palétuviers, Cézanne au cœur de sa carrière, Picasso à Guernica.

Mais aussi ma copine peintre au bord de la rivière, reprenant le spectacle des pontons ostréicoles multicolores au-delà des feuillages d’hortensias de son jardin.

Et encore ce pote photographe et ses coquelicots semés au hasard d’une dune cost-armoricaine… et bien d’autres artistes, musiciens, sculpteurs ou écrivains, qui chacun à sa guise a retranscrit la beauté sauvage d’une nature toujours merveilleuse.

Puis, ce matin, au détour de la route, le lever du soleil à travers le brouillard… une magie de rouge embrumé, de filets de brume harponnés par un disque en feu qu’on dirait à peine sorti d’une forge.
Devant cette féerie, je coupe le moteur, quelques oiseaux percent le silence, je me laisse happer par l’atmosphère fantastique qui se dégage de l’instant. Dans quelques secondes tout aura disparu, le soleil ne se laissera plus observer en son plein cœur, la grande ligne droite sera percée de deux billes blanches qui grossissent, comme un vaisseau qui atterrirait, venu de nulle part, au milieu de ce halo incandescent, pour nous apporter la réponse ultime à toutes nos interrogations.

Le temps que je savoure cette jouissance douce et rare, la voiture s’est avancée rapidement et passe devant moi, la brume est déjà différente, le soleil plus brillant, mon train part dans dix minutes, je ne peux m’attarder davantage.

À présent nous roulons à travers un autre brouillard, le disque solaire est aveuglant à travers ces limbes, les arbres que j’aperçois sont d’étranges statues, tout est gris et blanc, une autre beauté s’offre à moi.
J’aime cette sensation de vitesse sur les rails, les bosquets et les habitations qui défilent comme irréels, un décor en carton pâte qu’on aurait disposé au fur et à mesure de l’avancée du train et qui ne serait là que pour moi, pour me permettre de laisser surgir dans mon esprit et sur le clavier l’histoire qui n’attend que moi, qui ne peut prendre vie qu’à travers moi.

Pourquoi, pour qui, peu importe, j’ai l’intime conviction (prémonition ?) qu’il faut laisser les mots prendre ainsi possession de mon cerveau pour engendrer ce qui va suivre.

Peu après cette introduction, un interlude s'offrit à moi :


Elle s'était assise sur le siège en velours rayé de gris et bleu, fébrile, comme essoufflée par une course soudaine, ou était-ce l'émotion de sa fuite impromptue.

Comme je prenais mon temps pour ranger sac à doc et mallette sur les étagères surplombant nos sièges, elle sembla s'impatienter, puis se reprit. J'interprétai ce semblant d'énervement comme le prélude à un voyage ennuyeux aux côtés d'une midinette agaçante.

Une fois assises côte à côte, ayant échangé à peine un regard, nos existences reprirent le cours parallèle qu'elles avaient suivi jusqu'alors, dans l'ignorance totale l'une de l'autre.
Son parfum me parvenait pourtant, doux ensemble capiteux que mes piètres connaissances en la matière ne m'aidèrent pas à reconnaître.

Le paysage boisé défilait déjà à mes côtés, une petite fille tout droit sortie de "La Petite Maison dans la Prairie" nous prouvait que les lois de l'ère du jeu vidéo priment sur celles du respect des voyageurs.
Je réprimai mon envie de lui demander de couper le son de sa console en farfouillant dans mon sac - ouf, Thérèse Raquin saurait certainement me sortir l'esprit de cet espace décidément trop confiné.

Elle s'était endormie au bout de quelques kilomètres, rattrapée brutalement par la baisse de pression dès les premiers tours de roue.
L'angoisse d'être happée de nouveau par l'enfer quelle venait de quitter desserrait peu à peu son étreinte. Quelques bouffées de stress la saisirent encore, des visions de cette matinée si violente lui revenaient à l'esprit, tordant son ventre au passage des spasmes qui l'avaient tenue éveillée une bonne partie de la nuit.

Son dernier rêve la reprit brutalement - déjà assoupie ou sur le point de l'être, elle gémit faiblement et sa main pâle se crispa sur le sac qu'elle tenait serré sur ses genoux.

L'étau se refermait lentement, comprimant son abdomen dans une douleur effroyable, écrasant ses poumons, l'obligeant à un effort surhumain pour aspirer un faible filet d'air...

Elle sursauta soudain, respirant par à-coups pour reprendre son souffle. Ses yeux bleus verts s'ouvrirent, noyés de larmes, pour un appel silencieux à ma compassion...

Je lui souris doucement en murmurant :
- c'était un rêve, tout va bien !
Elle mit quelques bribes de seconde à reprendre goût à la réalité :

- Merci, je vous prie de m'excuser, je vous ai dérangée ?

- Ne vous inquiétez pas, ma lecture est assez fastidieuse, merci à vous de m'en avoir sortie !" osai-je, blasphémant honteusement devant l'oeuvre de mon auteur fétiche.
Elle soupira, sortit un paquet de mouchoirs jetables de son sac et s'essuya rapidement les yeux.
Son envie de se confier débordait d'elle comme un gros chagrin d'enfant. Son effort pour se contenir et refouler ses larmes m'emplit de pitié :
- Vous voulez qu'on aille prendre un café ?

- Non merci... vous êtes bien aimable...
Elle eut à peine le temps de prononcer un faible "ça va aller" avant de se lever soudainement en direction des toilettes.
Sa démarche un peu tremblante m'évoqua l'image d'une jeune biche aux abois à la fin d'une cruelle chasse à courre.


En relisant ces notes prises après l'arrêt où elle est descendue, je réalise enfin que celle que j'avais prise pour une femme maltraitée fuyant son enfer de foyer n'était en réalité que la première victime de cette gastro dont m'avait prévenue mes amies avant mon départ, que je ramenais bien évidemment dimanche soir dans mes bagages pour contaminer ma famille restée bien à l'abri des microbes parisiens...

voilà, pour l'instant c'est tout, compta et boulot de garde-malades oblige !!!

comme un lundi - le premier ?

bon ça vient en vrac mais trop c'est trop, alors j'en laisse un peu s'écouler ici de ce trop-plein qui déborde et envahit mon esprit et me berce et me ballotte depuis trop longtemps. Le catalyseur est , formidable coup de gueule d'une écrivain que j'ai découverte après coup, enfin après lecture, mais c'est vrai que ça m'a fait un coup, cette lecture, car elle exprime exactement ce que je pressens, ressens et redoute depuis tant d'années, devant la froideur, l'indifférence et la mocheté de tout ce qui m'entoure constamment... Même si je suis capable de discerner le vrai du faux - sauf en littérature ou en relations humaines, je suis beaucoup moins perspicace - dans ce monde, il y a comme un décalage qui s'est peu à peu transformé en gouffre et je tremble et j'en maudis la terre entière tellement j'ai peur de ce qui va se produire si on n'arrive pas à se secouer VRAIMENT. Bon, reprenons : c'est arrivé ce matin, après cette pause qui n'en était pas non plus une puisque je venais tout juste d'allumer ma bécane, 8h25, je me suis dit pendant le démarrage que j'étais quand même gonflée de commencer ma journée si tard ... habituellement c'est plutôt 7h15, mais là mon fiston m'avait fait le coup du thermomètre sur le radiateur à 6h55 donc j'ai pris le temps de m'en occuper avant de songer à ce début de semaine ... qui n'est en fait que le prolongement d'un bon gros week-end de travail... mais ça c'est une autre histoire. Donc, j'avais quand même pris le temps de parcourir le discours de mon héros de l'année, Monsieur JMG Le Clézio, qui est allé à Stockholm hier recevoir son prix Nobel et nous a enchanté de sa prose pour nous expliquer pourquoi il écrit et pourquoi il faut sauver la littérature et le langage et toutes ces belles choses qui font qu'on est bien sur terre - enfin certains d'entre nous... J'ai bien compris tout ça, bien aimé aussi, mais ça me donne toujours comme un arrière-goût amer de favorisée qui me culpabilise... ouhlala c'est compliqué je m'égare et batifole dans le pré de mes pensées sans égard pour vous pauvres lecteurs - si j'ose espérer que vous soyez plus d'un(e) ! donc je reviens à ce qui m'a réveillée et même comme décoiffée après le brushing du début de semaine, cette belle envolée de colère mêlée à tout un tas de détails historiques immondes bien que réalistes qui donnent des frissons et toute une ribambelle de sueurs froides quand on s'imprègne du sens réel de ces paroles : Merci Mme Anne-Marie GARAT d'avoir écrit ce que j'ai lu avec délices et effroi ce matin, et tout le reste présenté sur votre blog, promis demain je cours à la Fnac ou tout à l'heure sur Amazon ou bien j'en parle à ma libraire dès qu'elle aura rouvert - pour les prochaines vacances qui ramènent les parisiens cultivés parmi nous... beurk, dire qu'il faut les remercier pour ça aussi !!! bon trêve de commentaires oiseux, je veux réagir et je suis comme la dernière personne à commenter ce post du blog de Martine LAVAL : je fais ce que je peux à mon niveau, avec mes petites actions de membre d'une association qui aide un peu au développement des relations humaines dans mon village, à l'ouverture des esprits enfantins autant que parentaux à ce monde si beau qui est devenu si moche par endroits et pour certains... pour beaucoup... pour trop de gens exclus, privés, spolliés ... Je fais quelques gestes pour les défenseurs d'idées que je trouve primordiales, comme ici ou , c'est peu mais c'est le petit boulot de fourmi qui fera la grande rivière... euh... enfin vous m'avez comprise ! et puis j'ai des lectures intéressantes, édifiantes, récréatives ou même hautement instructives... enfin bref, de quoi me changer les idées sans oublier ma mission, celle que j'ai acceptée il y a longtemps déjà, quand je militais pour ATD Quart-Monde à la sortie de la messe après avoir convaincu mes "camarades de collège" comme disait ma mère - un peu réac - d'acheter mes paniers en patchwork style Hollie Hobby et les cartes postales fabriquées en papyrus de Thaïlande - ramenées de son dernier voyage par la mère de la présidente de notre association de jeunes filles rangées (si tôt !) parmi les imitations bon marché de sacs aux V enlacés et les foulards en soie qui rappellent étrangement le rang de perles qui va avec... bref, je sais juste maintenant qu'à défaut de changer le monde je peux au moins essayer de ne pas changer moi, mais par contre passer en mode "action" serait du meilleur effet pour ma déculpabilisation. Donc j'écris ici, ce soir, pour dire tout le mal que je pense de notre société occidentale en général et de notre démocratie française en particulier... et j'en reviens à l'essentiel : on ne pourra pas dire qu'on ne savait pas, ni même qu'on ne l'avait pas souhaité, puisqu'on ne fait rien pour l'empêcher non plus. Voilà, je suis à court et obligée d'aller gagner ma croute en alignant quelques chiffres dans un tableur, mais je n'en resterai pas là, et espère vivement que quelqu'un (plusieurs ?) réagira à ces mots pour soutenir mon propos et qu'ensemble nous pourrons y faire quelque chose... ??? A suivre !

vendredi 28 novembre 2008

soir d'automne

ce soir en rentrant du boulot les champs avaient comme des cheveux blancs très fins bien peignés à l'horizontale comme pour souligner les couleurs turneriennes du ciel en partance vers le repos vespéral.

c'était un coucher vaporeux, ouaté à souhait, seuls les bas-côtés boueux rappelaient le misérable début de cette journée de novembre.

on aurait dit une photo prise quelque part en Irlande, ou au Pays de Galles, je me suis crue revenue aux temps ancestraux où les korrigans n'hésitaient pas à sortir à la nuit tombante pour profiter des dernières lueurs et remplir leurs poches de baies de sureaux et autres cotylédons nourriciers.

j'ai maudit le vrombissement du moteur qui me propulsait vers mon nid douillet, sûre de son efficacité à dissuader les créatures du monde parallèle de sortir une moustache de leur abri.
Une fois garée ma carriole bruyante, refermée doucement l'opercule qui m'y tenait calfeutrée, j'ai tenté une station silencieuse aux abords de mon pré pour en surprendre un ou une...
Las, le soleil avait achevé d'embraser les cieux, l'orée de la forêt s'était faite ténébreuse et il ne me resta plus qu'à actionner le loquet de ma demeure pour y trouver consolation en allumant une belle flambée...

vendredi 31 octobre 2008

en passant près de l'église

hier, essayant de renouer mon foulard, fermer ma veste et trouver les poches qui accueilleraient mes mains glacées pour le temps où elles ne me serviraient à rien, j'ai aperçu l'objet de mes craintes enfantines qui descendait vers le port sur le même trottoir que moi, nous allions très bientôt nous croiser...

Que faire ? rechercher mes clés dans les tréfonds de mon sac de fille, entamer une conversation factice sur mon portable, traverser la rue vers la supérette comme si j'avais soudain une course importante à faire ???

Non, tout simplement affronter le monstre, me suis-je dit bravement ... Après tout, ce n'est qu'une vieille qui va chercher ses médicaments ou du lait pour ses chats avant que le soleil ne se couche, regarde comme elle a l'air transi, et puis si ça se trouve elle ne t'a même pas reconnue, alors ...

- Bonjour Madame", l'ai-je d'abord abordée, puis, me sentant subitement redevable... "Vous vous souvenez, je passais mes vacances d'été chez ma grand-mère, quand j'étais petite ... au bout du chemin vers la Poste, derrière chez vous, vous voyez ?...

- Bien sûr que je me rappelle, comment allez-vous ?

- Comme toujours, à courir après le temps, et vous ?

- Ah, ben c'est qu'on se fait vieux, comme tout le monde, vous savez... Et vos enfants, comment ça va ?

Là, je suis restée scotchée. ça fait pourtant seize ans que j'ai accouché pour la première fois, donc j'aurai dû me souvenir qu'on s'était bien revues depuis mes jeunes années, mais bon, voilà, elle n'avait pas perdue de vue que je m'étais installée dans le coin, que j'étais maman et me jetait ça en guise d'apéro à une conversation qu'elle espérait sûrement longue et variée.

- Eh, justement, je viens de fêter l'anniversaire de mon grand hier, et les quatre-vingt seize de ma grand-mère aujourd'hui, vous voyez !!!

- Ah ben dites donc, et comment elle va, Madame votre grand-mère ?

Là, je me suis sentie comme engluée dans du charterton, c'était désagréable mais tout de même un peu réconfortant, de voir qu'elle suivait... j'ai mentalement refait le chemin en marche arrière et me suis rendue compte qu'elle devait avoir à peine dix ans de moins que Mamie, donc une once de respect s'est ajoutée à ma considération pour cette silhouette grise et bleue marine qui se recroquevillait sous sa blouse passée.

- Pas trop mal, elle est encore chez elle, toute seule, mon oncle lui rend visite tous les jours, ça va... C'est juste qu'elle ne peut plus lire ni coudre, ses yeux baissent beaucoup...

- Ah, ça doit lui manquer, elle qui était toujours si coquette...

Là, j'ai eu le sentiment d'avoir pris un seau de superglu sur la tête ! Comment pouvait-elle savoir que ma grand-mère ne s'était jamais acheté un vêtement en prêt-à-porter et avait toujours dessiné, conçu et produit les habits de tous les membres de sa famille depuis son mariage, puisqu'elle n'avait plus habité là après ?

- Ah oui, vous vous souvenez, mais dîtes donc, ça fait pourtant longtemps qu'elle a quitté le bourg, elle vit à l'autre bout de la région depuis bien longtemps, vous savez ?

- Bien sûr, je me souviens bien, j'étais pas encore à la retraite, quand elle est partie !

Là, je me suis dit qu'il n'y avait pas que les épissures sur les cordages des bateaux de course qui sont finies au greytape, moi aussi je venais de me faire saucissonner bien serré !!! Mes premiers souvenirs d'elle remontaient aux années 70, je détalais dans le chemin creux dès que j'apercevais sa silhouette ou celle plus terrible encore de sa vieille mère... Ma cousine et moi, on les croyait sorcières, ma grand-mère les disait ignares, ma mère m'avait conseillé de ne pas leur manquer de respect car elle avait l'appréhension de leur réaction, deux vieilles qui ne voient jamais d'enfant, c'est peut-être dangereux...

- Ah bon, et vous faisiez quel métier, avant ?

- J'étais petite main en atelier de couture, j'ai travaillé chez Chanel, et puis chez d'autres, pendant 55 ans en tout ...

Bon, c'était le coup de massue final, j'ai maudit un instant ma cousine qui m'avait fait pisser de rire un jour où on avait cru malin de sonner à la grille de leur courette pour les embêter et que la pauvre vieille s'était étalée de tout son long dans le chemin en essayant de nous rattraper !!

- J'ai eu une médaille du travail, vous savez... Mais je vous retiens, là, vous devez avoir à faire...

- Non non, enfin oui, mais, ... vous devez avoir plein de souvenirs, j'aime beaucoup écouter les anciens raconter les temps d'avant...

Là, mes espoirs de reprendre le fil de mon projet de biographe public m'ont assaillie en bloc, j'ai revu mentalement toutes les pages du dossier que je n'ai jamais eu le courage de présenter à la mairie du village ... pour finalement juste prendre le temps de lui dire que je passerai la voir un de ces jours. C'est alors qu'elle m'a donné le coup final :

- Oh oui, passez quand vous voulez, je ne vois personne, vous savez, mes enfants sont loin, ils ne viennent qu'à Noël, et puis si ça vous fait plaisir...

Alors on s'est claqué des bises affectueuses, j'ai fini la journée avec, sur ma joue gauche, une trace de mauvais rouge à lèvre et le souvenir aigre-doux d'un visage satiné à la poudre de riz .

lundi 22 septembre 2008

22 août, ou le 23 déjà

Parfois la vie lui semblait si légère, comme une feuille de papier dépliée qui s'envole au vent d'automne, lâchée par la main d'une fille en pleurs sur le quai du Ferry pour Staten Island.
Et souvent, bien trop souvent, c'étaient de longues errances dans la lourdeur monotone d'un jour qui ne veut pas finir, rempli d'enclumes et de chars à boeufs labourant son coeur transi.
Lorsque l'équilibre semblait enfin atteint entre les brefs instants d'insouciance et les pesanteurs longuissimes de l'ennui, elle avait enfin la sensation d'être vraiment là, elle, tout entière livrée à la vie, la vraie.
Alors elle marchait, rêvait, mangeait le moment présent comme une pomme légèrement acidulée un après-midi de chaleur estivale. Elle croquait à bonnes dents dans ce sentiment de plénitude qui l'enveloppait si voluptueusement, l'étreignait d'une force si savoureuse.

samedi 20 septembre 2008

12 septembre, midi au soleil sur les quais

en fait ce serait juste regarder, contempler, scruter les détails du paysage comme de mes sentiments, vagabonder avec les mouettes entre les reflets d'azur sur l'eau ondulante, planer à travers les risées qui chatoient sur la vaste étendue de mes pensées, flirter avec le vent d'automne en regardant s'effeuiller mes souvenirs.
Jongler avec les mots, comme mes cils battent au rythme de mon coeur, laver mes yeux aux replis d'une branche de pin ployée au-dessus des rochers.
Laisser tourner les girouettes échevelées, surplomber le granit du môle de sensations enivrantes, glisser le long des plages en espérant atteindre enfin le paisible rivage de ma conscience.

Et l'écrire.

Et le vivre.

Et le laisser à lire.

ça fait beaucoup...

... si peu de temps ...!

dimanche 20 juillet 2008

une revenante

Bon d'accord, OK je l'admets, et m'excuse, et m'aplatis et me confonds avec le gris du lino en pitoyables tentatives pour me faire pardonner cette effrontée absence ... qui n'a pas l'air d'avoir désolé grand monde puisque personne ne me l'a encore faire remarquer.
Trois mois sans rien dire, ou plutôt rien écrire, c'est exactement le temps que m'a pris ma réinsertion professionnelle... voilà, c'est lâché : j'ai capitulé, signé en bas d'un contrat de travail comme secrétaire administrative et maintenant je ne fais plus rien de ce que je m'étais juré de préserver... je compte, je trie, je classe, j'écoute et je parle, je produis des listes, des tableaux de chiffres et des courriers, mais plus rien de personnel, plus rien de spontané...
Sauf dans ma tête, bien sûr, comme toujours, plus que jamais même !
Donc un petit aperçu de tout cela viendra un de ces jours où j'aurai pris le temps de retranscrire mes griboullis de cahier à spirale sur le clavier.

Pour l'instant c'est semaines de tarés et week-ends de fous qui se succèdent sans se départir de leur sérieux un peu guindé, vivement la retraite qu'on y arrive.

Voilà c'est pas beau et même carrément moche, je sais.

Mais faut bien bouffer et puis refouler ça fait toujours de la matière au bout du compte donc peut-être que c'est pas si inutile que ça ??? (non surtout si c'est pour me détromper c'est pas la peine de répondre !!!).

Bon allez, je retourne à la compta de mon amoureux et au rangement des paperasses de l'été dernier... il serait temps !

Bien des bises et bon été !

mardi 22 avril 2008

et le mardi ?

Le mardi, on est déjà tout ankylosé des efforts faits la veille pour relancer la machine... alors on est un peu essoufflé, comme groggy d'une lutte pas tout à fait terminée, en tout cas pas en vainqueur, puisqu'on a ce désagréable sentiment d'échec, de ne pas y arriver, d'être un bon à rien...

Même pas levé tôt, même pas motivé par le soleil qui pointe son nez dès 6h30, juste une grosse envie de rester coincé sous la couette, d'ailleurs c'est ce qu'on fait, parce que hein, y a pas de raison que les enfants s'en donnent, du sommeil en plus, eux, et pas moi !!...

Voilà, donc pas beaux à voir vers 10h45, la plume hargneuse et revêche, les neurones encrassés et pas la pêche pour continuer...

Peut-être plus tard ? Si le vent veut bien se lever, entrouvrir la fenêtre sale de la dernière tempête et dépoussiérer mon cerveau pour le rendre efficace...

lundi 14 avril 2008

comme un lundi

Bon, voilà, c'est lundi matin, déjà deux heures que j'ai ouvert le premier oeil, le deuxième pas longtemps après, en fait juste avant que mon amoureux qui partait bosser n'allume le plafonnier, donc je me suis levée éblouie et de mauvaise humeur... pfffh !! Après des rêves de troupe de théâtre en goguette (le metteur en scène avait fait apposer un visa à son nom pour le Maroc sur mon passeport...), de voyage aux Etats-Unis où je tombais dans un café tenu par une Française aux yeux clairs qui finissait par me sermonner sur les évangélistes - ou les mormons ? - et d'une vaine tentative de traverser un grand boulevard parisien avec ma mère, à l'heure de pointe et sous la pluie (???), me voilà donc dans le monde réel du lundi matin... Un pas comme les autres tout de même, puisque les enfants sont en vacances et que j'ai donc le droit à un petit-dej' peinard toute seule devant mon bol et mes tartines. Ouf ! C'est pas que j'aime pas déjeuner avec mes kids, mais la cuiller à confiture toute poisseuse et la toile cirée qui colle au couteau à beurre, ça me donne dès le matin des idées d'infanticide et je sais que c'est pas bien pour le moral !! Donc, après une petite heure de boulot, me voilà à regarder les news sur le site du monde. En voyant le titre "Carla nue" je résiste et décide de ne plus cliquer sur des liens comme ça, ça suffit et d'ailleurs il serait temps que je renvoie son CD à la maison d'édition comme je m'étais juré de le faire en décembre dernier, après tout ce disque avait accompagné mes heures de départ en live, donc il n'a plus lieu d'habiter sous le même toit que nous puisque j'en suis revenue, de ce monde virtuel ... Ensuite je tombe sur un article "Concilier vie familiale et travail"... ah bon, y en a encore qui croient que c'est un sujet, ça ?? Parce qu'ils ont toujours pas compris que c'est évidemment inconciliable, incompatible pour l'épanouissement humain, eux ? Encore des qu'auraient besoin d'un bon cours, ouais ! Mais là j'ai pas le temps ! En fait, ce qui m'a mis dans cet état de vendredi - parce qu'être énervée après le monde professionnel dès le lundi, c'est plutôt rare pour moi - c'est le dimanche midi chez les potes à fonctions importantes (chef d'entreprise et cadresse dynamique) qui ne veulent pas admettre que le développement durable ça commence par le tri des déchets de la famille (et oui, même de la résidence secondaire !) et puis l'après-midi glauque à essayer de finir "Un barrage contre le Pacifique" de Duras entre deux averses de grêle qui m'empêchent de jardiner une fois de plus... Je termine à 1h du mat', épuisée, les yeux qui piquent et presque la nausée de cette histoire si moite de sentiments bizarres sous le climat asiatique. N'empêche que la dame avait du talent, je ne le savais pas encore. Et donc mon bouquin à moi qui s'augmente virtuellement de quelques paragraphes tous les soirs quand je m'endors en écrivant mentalement, mon livre à moi de dans quelques temps quand j'aurais le temps, et ben il est pas près d'être publié !!! Voilà voilà, maintenant je retourne au taf en remerciant mentalement mes potes pour le délicieux repas et le rayon de soleil citadin qu'ils veulent bien nous administrer régulièrement... quand même !

mercredi 26 mars 2008

et le temps...

pfffh... je sais, le temps qui passe, les gouttes de pluie qui tombent puis s'évaporent et laissent doucement s'éteindre les primevères sur le balcon, la couleur du ciel, plombé, sa froideur, glacée, l'odeur de l'herbe fraîchement coupée dans le jardin voisin, et les minutes, toutes ces centaines de secondes qui se sont accumulées entre vie et rêves.

Bon, faudrait pas non plus se camoufler serré derrière toutes ces excuses, il vaudrait mieux accepter tout de suite de reconnaître que c'est une flemme aigüe qui motive ces non-actions, que c'est une lâcheté de couarde qui me tient aux flancs et ne me lâchera pas avant... la retraite ? l'autonomie des enfants ? la débâcle physique de notre beau couple ?...

Que de faux semblants, quelle montagne d'inepties !

J'ai lu Gavalda dans le Elle du 10 mars, chez le psy cet après-m, en attendant que mon pré-ado démêle la pelote de crin de ses difficultés relationnelles avec ses congénères. Bon, c'est pas qu'on s'ennuie mais je préfère ses bouquins. Et j'aimerais être cette écrivain qui ne prend pas de pincettes pour se comparer à Sagan et assume totalement d'avoir créé des vies sur papier... ou bien c'est la journaliste qui aimerait que ?
A lire Greisalmer dans Le Monde on pourrait penser que c'est plutôt une dérobade, mais comme je la comprends, cette femme qui ne veut pas être sur le devant de la scène et considère l'existence de ces personnages plus intéressante que la sienne !

Ce qui me rappelle que parmi les prétextes fallacieux qui me retiennent de me plonger dans l'écriture, il y a celui, ultime et prépondérant, du désir de rester anonyme : comment faire si jamais mes écrits plaisent et laissent transparaître des sentiments que j'aimerais garder pour toujours à moi toute seule et perpétuellement cachés aux intéressés ?

Prendre un pseudo ? Ne pas chercher à publier ?

J'ai choisi de ne pas m'y mettre, comme ça je passe à côté de tous ces questionnements et ouf je peux aller chercher mon pain tranquille sans redouter de croiser belle-maman qui en a pris une claque dans le chapitre V.

Bon, comme on dit, tout ça n'est que verbiage et .. je ne retrouve pas la citation, celle qui dit que l'écrivain invente les vies qu'il aimerait vivre, ou celle que j'aimerais faire mienne, qui raconte comme Khalil Gibran dans "Le Prophète"que les personnages que j'invente ne m'appartiennent pas, comme mes enfants, mais qu'ils me font devenir auteur, comme mes garçons me façonnent mère.

Pfffhhh... ce qui ne fait pas pousser mes carottes ni planter mes groseilliers...
et encore moins tourner les pages virtuelles du roman que j'ai en tête.

lundi 17 mars 2008

encore quelques pages...

et voilà, encore quelques pages, plusieurs centaines en quelques dizaines d'heures... et non, pas de l'écriture, hélas, non, que de la lecture... mais de la qui fait du bien car me donne plein d'envie, d'idées, d'énergie... mais me bouffe juste le temps qui me manquait déjà tant !!

C'était "La Consolante" d'Anna Gavalda, parce qu'il arrivait en librairie le jour de mon anniversaire et que je n'ai pas même eu l'idée de résister.
Quand j'ai ouvert le beau - et lourd ! - volume, c'était pendant que la soupe cuisait, mercredi soir (oui, quand même, j'ai su résister une nuit et une journée entières, dis donc !!), j'ai senti la petite onde malicieuse de la culpabilité de bibliophage... mais non, je ne l'ai pas laissée me submerger, j'ai parcouru le premier chapitre, j'ai râlé un peu en voyant les phares dans l'allée et en appelant "à table" quand la porte d'entrée s'est refermée sur mon amoureux...
Et dès la dernière assiette bien rangée dans le vaisselier, je me suis plongée dans la vie de Charles Balanda...
J'en suis ressortie une première fois pour dormir un peu, puis pour faire oeuvre de maman-secrétaire-femme de chef d'entreprise-jardinière-ludothécaire etc etc... puis j'ai replongé pour une nuit presque blanche, et j'ai fini de laper les dernières miettes en attendant mon fiston à l'arrêt de bus du vendredi soir...

Y a pas à dire, la vie est ... pas plus belle, pas moins moche, mais différente quand on sort de cette lecture... Bon, d'accord, elle aurait pu mettre moins de ... et de ??? à la fin de quelques paragraphes, comme le fait remarquer un critique (l'Express ?), elle aurait pu éviter certains clichés, mais moi, il y a des phrases qui me parlent, comme ce "Qu'est-ce que tu croyais, you silly old fool, qu'il était venu photographier les ponts de Madison ?"
Là, clin d'oeil à mon film préféré, je craque complètement !!!

Et puis aujourd'hui, entre le café et le goûter, il y a eu "In Memoriam" de Linda Lè, que je serrais depuis de si longs mois entre John Irving et Haruki Murakami... mes prochaines nuits blanches, promis...
Alors là, je n'arrêtais pas de penser à Vincent Josse, qui en disait tant de bien en septembre dernier, et j'avoue que j'ai eu du mal.
D'abord le carré d'agneau du resto ouvrier m'a fait tomber deux trois fois dans les volutes de début de digestion, et puis c'est un style vraiment très léché, je me souvenais bien que le monsieur se délectait de ça dans sa critique... mais j'avais l'impression d'être dans un mélange de Graham Greene et Paul Auster, avec un goût de Sagan qui n'allait pas avec... enfin bref, j'ai eu du mal, bien que tout ça soit effectivement assez beau... mais je sais pas bien pourquoi, j'ai éprouvé plus de malaise que de contentement à suivre ce pauvre écrivain transi.
Cette lecture m'a aussi rappelé ce post du même journaliste qui se plaît apparemment à fréquenter les mêmes trottoirs que ses artistes favoris, dans un périmètre assez restreint de la capitale... C'est quand même dommage d'en rester là.

Donc, me voici à nouveau devant mon écran, ouf, la vraie vie qui reprend ses droits, avec quelques grammes de neurones saturés en plus... et de la matière plein la tête pour me (re)lancer à mon tour...

Mais pour l'instant c'est l'heure de la soupe, des vérifs de devoirs pas faits et de tout ce qui clôt la journée comme d'hab... après, ce sera "Kafka sur le rivage", ou "Je te retrouverai" ??? J'hésite encore. Ou alors les derniers chapitres de "Passer l'hiver", d'Olivier Adam, une nouvelle par séance de pré-endormissement depuis Gavalda, ça fait pas de mal non plus (bien qu'un peu tristouille, oui !).

Alors hop, oublions une fois encore d'ouvrir les cartons, les boîtes à chaussure et tous les vieux grimoires, et partons causer aux poireaux avant qu'il fasse nuit !!

lundi 10 mars 2008

c'est la faute au temps

OK, j'avoue, ou plutôt je me trouve deux bonnes excuses, réunies sous le même mot, terme, vocable, phonème qui d'ailleurs, selon mon vieux pote Robert, est aussi, dans un sens détourné : "une hallucination auditive dans laquelle le sujet entend des voix" (si si, c'est Bob qui le dit, page 1424 de l'édition 1990, même...).

Alors donc, j'étais penchée à la fenêtre de mon subconscient ce matin comme à tous mes retours de rêverie, quand j'ai senti que ça allait arriver, dans le désordre mais tout ça dans les prochaines 24 heures : que je prenais un an de plus, qu'un bateau ou même plusieurs allai(en)t s'échouer pas loin, que quelque chose me tomberait sur la tête avant qu'il fasse nuit, etc...

Bon, d'accord, j'avais entendu comme tous les Français qui écoutent un peu les infos et en retiennent autre chose que le nombre de voix de leur maire sortant en ce dimanche soir électoralement très - trop - chargé, qu'une méga tempête approchait de nos côtes et qu'une quarantaine de nos beaux départements se trouvaient placés en "vigilance orange"... C'est joli, d'ailleurs, une vigilance orange, c'est beaucoup mieux qu'une alerte rouge ou une peur bleue, ça a un côté espoir (peut-être à cause de la révolution de la même couleur qui a chamboulé les coeurs de quelques milliers de slaves il y a deux ou trois ans ??)...

OK, je savais aussi à l'avance, depuis plus de trente cinq ans d'ailleurs je le sais toujours et ne me trompe jamais, chaque année c'est pareil, je sais quel jour je suis née et que ça va encore m'arriver d'avoir à répondre "merci, c'est gentil", à ceux qui s'en sont rappelé aussi...

Toujours est-il que, réveillée au milieu de la nuit par les craquements de ma maison tout en bois, j'ai attendu patiemment que le réveil se déclenche (admirez au passage ma zénitude, il s'est quand même déroulé entre trois et cinq heures, les avis divergent encore entre mes voisins de hameau et les copines de la côte) pour enfin réaliser que ce dix mars, j'allais à la fois entrer dans ma dernière année de trentenaire et perdre mes ultimes illusions quant à mes dons de voyance onirique : oui, je vois les choses qui vont arriver, les gens que je vais rencontrer, la nuit, dans ma tête, il se passe tout ça !!

Pffh, c'est un peu fatigant, comme constat, du moins à 5h48 ça peut paraître un peu déprimant pour commencer la journée, surtout un lundi, mais bon... Fallait bien que je me lève pour constater qu'il faisait trop noir pour être un vrai jour de mars, trop sombre pour une belle journée pré-anniversaire, trop tôt pour que je me réveille pour de bon, donc j'ai décidé de voir si mon amoureux me laisserait errer doucement en son royaume... et après c'était le matin et tout son cortège d'actions minutées, de timing serré et de bisous volés pour que les enfants puissent affronter l'interro de maths et la rédac de français sans trop de douleur.

Bref, il était déjà 18h25 quand j'ai réalisé tout ça, quand une grand-mère de mes enfants, celle du bout de la France, nous a téléphoné pour savoir si on ne s'était pas encore envolés ... elle croit pas si bien dire, vers 16h j'ai bien failli faire un vol plané par-dessus une barrière tellement le vent décornait les boeufs qui étaient derrière...
C'était juste après que les bouts de toit d'une vieille bicoque du centre ville se soient aplatis à dix mètres de moi dans une ruelle assez étroite ... j'en ai encore des frissons à penser que j'avais eu les quinze secondes qu'il fallait pour passer à cet endroit-là tranquillement !!

Bon, maintenant, à l'heure où je vous l'écris, je me suis repassé le scénario des dizaines de fois, j'ai vérifié dans le journal, sur Internet et même dans le dictionnaire... c'est pas une maladie parce que ça fait même pas mal, mais j'en suis atteinte, cette fois j'en suis sûre.

Le phonème. C'est plus joli qu'un érythème ou une chrysanthème, quand même, non ?
Bon d'accord, Bob dit que c'est une pathologie, mais moi je m'en fous, parce que ça me plaît bien de voir de temps en temps les choses qui vont se passer... ou les gens que je vais avoir à affronter ou à admirer, c'est selon... et que ça porte la même appellation que ces petits assemblages de lettres qui nous aident à être au monde.

Pendant longtemps j'ai refusé d'y croire, de le reconnaître, d'y prêter attention. D'ailleurs, je ne veux toujours pas accorder plus de réflexion à ce constat : je dois juste essayer de faire avec, d'être plus forte avec ça ou de ne plus y penser pour rester naturelle... mais puisque ça fait partie de moi, à quoi bon le nier, le repousser, s'en passer ?

Tout ça pour dire que c'était la faute au temps, celui qui passe et celui qu'il fait, que ce matin je me suis réveillée plus vieille (mais ça, c'est comme vous, OK) et que je n'ai pas pu vous raconter les dix derniers jours et tout ce qui me trotte dans la tête à quelques jours de changer de décade.

Tant pis, si c'est pas ma faute j'ai même pas à m'excuser, youpi, je peux souffler mes bougies en vous remerciant de m'avoir lue jusqu'en bas de la page, merci, merci, merci... Fallait pas !

Alors bon, pour me faire pardonner, ou pour vous rendre grâce, c'est promis, dès tout à l'heure, quand j'aurai passé la barrière, je vous raconte... mais d'abord, je vais cuver toutes ces émotions dans les bras de mon amoureux, en espérant que le vent va finir par se calmer, que la charpente va s'arrêter de craquer... et que demain y aura du soleil pour mes 39 printemps !!

Alors joyeux anniversaire à Lena, Hugo, le garagiste du coin et tous les autres du 11 mars !

samedi 1 mars 2008

j'ai raté le jour rare !

Zut et flûte et déchet de brebis, je voulais le faire et voilà, c'est trop tard, ça fait déjà près de vingt heures que j'ai raté ça !!... La prochaine fois c'est dans quatre ans, et qui sait où j'en serai et si j'aurai encore le punch pour en profiter ce jour-là !!!

En fait j'ai été empêchée par un concours de circonstances de la vie toute bête, comme regarder les blogs que j'aime bien (comme celui-là ou celui-ci), essayer de concilier l'heure du réveil poussif avec les lessive-ménage-vaisselle d'avant arrivée de parents un peu trop âgés pour les accueillir dans un taudis pour la fin de semaine... et aussi conduire les enfants à leurs dernières activités des vacances ou surveiller que le grand a bien fini sa dissert' à rendre lundi...

Et encore aider mon amoureux à construire le plancher de son atelier, et puis préparer un repas de presque-fête pour toute cette smala, trois générations réunies c'est pas toujours facile de les contenter, mais grâce aux coquilles du pote pêcheur et à la mâche du jardin, on a réussi un équilibre assez savoureux...

Pffh, et quand j'ai réalisé, c'était trop tard, j'ai rien eu le temps d'écrire, plus la pêche et c'est déjà aujourd'hui.

Donc, pour me faire pardonner, enfin de rien puisque je n'avais rien promis, hein, faudrait pas non plus que j'en rajoute avec ma culpalisation à deux sesterces... donc, voilà ce que j'ai trouvé de mieux à me mettre sous la dent : un petit billet pas trop mal tordu sur Le Monde.fr

Bon, là maintenant c'est retour d'une plongée un siècle en arrière avec ma grand-mère, d'ailleurs, clin d'oeil à Manu, j'avais vraiment la tronche d'une Sainte Nitouche dans ma robe de communiante, mais pas pire que ma propre mère, j'ai juste le Missel et la coiffe en moins !!

Bon, plus de temps demain sûrement...

mercredi 27 février 2008

et qu'est-ce que vous dites de ça ?

moi, j'adore... c'est un extrait du livre "Les croissants du dimanche", d'Annie Saulmont. C'est excellent et c'est ici.

Respect et admiration pour cette écrivain qui m'enchante vraiment, je cours l'acheter !

Merci à Télérama de m'avoir mis sur cette piste.

Et pour Manu : une prière ? je vois pas bien ... plutôt une introduction à quelque chose, des actes, du temps à prendre, des souvenirs à laisser ressurgir, qui m'effraient...

En tout cas, promis, dès que viennent quelques heures apparemment inutiles, je m'en saisis et je commence à imprimer, je cherche des adresses d'éditeurs et je vais acheter des timbres... Donc, si rien ne change, je serai peut-être grand-mère d'ici là (non non, les enfants, c'était juste une image, ne vous pressez pas trop, ce n'était ni un souhait ... ni une prière !!!).

Parce que aussi, il y a ça, qui me tient éveillée jusqu'au matin (le faire autant que l'écrire) :

le 22 décembre 2006

Après la lecture d’un article sur les débuts d’écrivain de JK Rowling, mère spirituelle et artistique d’Harry POTTER, je m’effondre et songe lamentablement que jamais rien de bien ne pourra m’arriver en comparaison de l’histoire fantastique de cette femme partie de rien pour atteindre la gloire avec des mots.

Tout n’est que vanité et présomption de talent quand on voit l’extraordinaire ascension de cette anglaise malmenée par la vie jusqu’au jour où elle invente son jeune personnage pour échapper à la dépression qui la guette… Elevant seule son enfant après avoir connu les affres d’une vie conjugale violente et apparemment scélérate, elle invente ce petit magicien sorti du placard à balais qui nous tient en haleine depuis bientôt 10 ans …

C’est pas dur, quand j’ai acheté mon premier tome, c’était en 2000, çà faisait déjà un moment que mon gamin de 8 ans me turlupinait : lui qui dévore tout ce qui ressemble à un mot depuis que la maîtresse de CP lui a refilé le virus … je cherchais quel bouquin lui mettre entre les mains pour pallier le manque flagrant et désolant de lecture adaptée à sa curiosité et son éveil plus qu’anormal.

Et là, çà a été le début de la grande aventure : comme on habitait en Outremer et que j’avais enfin trouvé l’édition de poche à la Fnac une demi-heure avant de reprendre l’avion, que j’étais exceptionnellement toute seule pendant le vol car les enfants étaient restés là-bas pendant que je m’offrais une bouffée de métropole pour le mariage d’un beau-frère, je me suis retrouvée plongée dans le bouquin pendant huit heures d’affilée, en faisant râler mon voisin qui ne supportait pas le petit halo de lumière déployé au-dessus de mon bouquin sans intermède de France jusqu'aux îles tropicales…

Le plus dur fut, à mon arrivée, la lutte amère à laquelle je me livrais avec mon fils qui savait bien que je lui avais ramené un cadeau, ignorant tout de ce Harry qui allait peupler ses jours et ses nuits, s’immisçant dans ses rêves les plus intimes pour des mois voire des années… Mais je ne cédais pas face à sa volonté de découvrir ce que j’avais bien pu lui ramener qu’il ne puisse acquérir sous les cocotiers : je me replongeais dès après le ti-punch de bienvenue et une fois les gamelles d’accras bien essuyées, dans le tome en question… ce n’est qu’à point d’heure que j’allai enfin déposer sous son oreiller de jeune écolier surdoué le livre tant convoité, avalé d’une traite donc, déjà entrain d’avaler les première pages du tome II car j’avais acheté les trois premiers d’un coup, me doutant bien que nous ne pourrions pas rester sur notre faim d’ici le prochain voyage en métropole.

Depuis, c’est les transes et l’extase à chaque nouvelle parution … J’ai fait une overdose en août 2004 à la lecture en 36h quasi non stop du tome V, il faut dire que j’étais clouée au lit par une putain de colique néphrétique… du pur bonheur : ne pas pouvoir mettre un pied par terre pendant une semaine m’a enfin apporté la douce opportunité attendue depuis des mois d’ouvrir le livre sans souci puisqu’au milieu de l’été, les enfants étant chez leur père, je pouvais lire à mon rythme et donc en toute tranquillité de la première à la dernière page !

Pour les 13 ans de mon fils, c’est le tome VI qui a fait son apparition à la maison … j’ai résisté au lourd désir de le lire avant de le lui offrir, comme il est sorti le jour de son anniversaire je n’ai pas pu lutter beaucoup …

Dans les mois qui ont suivi, je ne me suis jamais accordé la possibilité de n’ouvrir ne serait-ce que la première page, sachant très bien que je serais alors embarqué jusqu’à la 984ème sans pouvoir m’arrêter.

J’ai fait jurer solennellement à mon fiston de ne pas me dévoiler ne serait-ce qu’un paragraphe dudit tome, et je suis assez fière de constater qu’il tient parole et ne me tarabuste pas plus que çà ... en attendant avec impatience de découvrir que çà y est, je m’y suis mise … rien que pour le plaisir de pouvoir en parler tous les deux !!

Le livre trône donc sur ma table de nuit, entre les mémoires de Gabriel Garcia Marquez qu’on m’a offertes pour mes 35 ans et un des premiers John Irving chiné dans un marché aux puces… Je ne peux me décider à me plonger totalement dans l’un ni l’autre, pourtant l’envie me lance chaque soir … mais j’ai toujours à portée de main un poche d’une centaine de pages à savourer pour me faire passer l’envie folle de cette littérature carnivore autant qu’anthropophage !!

J’ai bien hâte de trouver le temps… et en attendant ça me fait une bonne idée à mettre dans ma liste à Père Noël : le transat qui me permettra de savourer le tome VI sur ma terrasse l’été prochain !

mardi 26 février 2008

26 avril 2006, bientôt le 27

Pour qu’un jour je puisse dire : « ça a commencé comme çà », il va peut-être falloir que je m’y mette…

Un beau jour, un jour pas comme les autres, une petite minute de rien du tout qui aura fait toute la différence puisque j’aurais été moi pendant le restant de mes jours après çà, si je m’accorde cette chance c’est bon, rien ne sera plus comme avant, j’arrêterai de penser en regardant défiler le paysage de tous les matins tous les midis tous les 13h30 tous les 17h55 que çà y est encore une journée sans le faire, encore tous ces mots qui restent bloqués là en travers de ma tête et font comme un barrage à la vraie vie que j’ai de dans quelque temps quand j’aurai trouvé le temps mais quand ???

Et pourtant çà y est, rien que ce premier jet et je suis déjà toute essoufflée,… Dieu que çà fait du bien de laisser les doigts couler tout doux impétueux pourtant sur le clavier qui n’avait rien demandé, ou plutôt non il ne demandait que çà depuis des mois qu’il est là installé par mon amoureux pour que toute la famille puisse s’amuser se cultiver communiquer et tout et tout .. mais moi ce clavier si tu savais mon amour c’est pour l’user que je le veux, c’est pour apprendre encore et toujours plus par cœur toutes ces touches, pour les élimer les angles de chaque lettre et ne leur laisser aucun répit après toutes ces phrases que j’ai écrites dans ma tête comment veux-tu que je fasse pour ne pas lui en faire baver, au clavier, va falloir qu’il les crache les mots s’il veut avoir une digne vie de clavier …

Comme c’est étrange quand même d’avoir à passer par ces bouts de plastique aidés de leurs acolytes impulsions électriques et de leur potes connexions électroniques et autres nanométriques puces qui leur filent un sérieux coup de main pour tout mettre droit devant mes yeux sur le morceau d’espace blanc sur fond gris ( d’ailleurs peut-on modifier cette couleur, c’est vrai çà fait vraiment trop enterrement, on pourrait pas mettre du bleu lagon ou du vert turquoise histoire de faire un peu plus exotique, çà donnerait des ailes à mes phrases et puis on pourrait imaginer que les mots sortent de l’eau, çà y est, ils ont trouvé la surface, ils peuvent respirer librement - livrement, lapsus involontaire de clavier où le b et le v sont vraiment si proches… curieux hasard - comme qui dirait ressurgis du fond de l’océan géniteur pour accoucher au grand jour de ma douleur d’enfermement verbal !), oui, comme c’est bizarre de devoir s’en remettre à ces bouts de pétrole retravaillé pour arriver à arracher à mes neurones et aux quelques cellules de mon pauvre organisme les phrases qui depuis longtemps m’habitent me harcèlent m’étouffent et en même temps me font tenir debout assise couchée mais toujours là présente à moi même à ceux que j’aime et qui m’ont choisie (pas tous) pour avancer sur ce putain de chemin de vie à la con …

Je pense à chaque fois à l’écrivain des temps anciens avec sa plume et son papier pas toujours de bonne qualité ou bien le pauvre scribe encore pire qui écrit sur des parchemins ou bien plus terrible encore la prisonnière qui n’a que quelques vagues bouts de buvard ou de carton pour étancher sa soif de dire de raconter pour ne pas mourir pour ne pas moisir pour rester elle-même et pouvoir un jour sortir de l’enfer, Ann, Malika, Ingrid ou Florence… et je me sens infiniment bête infimement maligne pour oser prétendre en quelques touches de clavier de PC tout ce qu’il y a de plus commun mais en même temps sophistiqué de dire voilà, c’est moi, c’est en moi depuis trop longtemps çà y est faut que je le lâche faut que çà sorte Bon Dieu que çà fait du bien allez encore un autre paragraphe sinon je ne dormirai pas bien.

Qui je suis pour lâcher tout çà, pourtant je m’en fous bien de savoir si quelqu’un va avoir quelque chose à redire à çà, je pense même que c’est surtout pas tous les empêchés d’écrire qui m’en voudront, parce que tout humain qui connaît le tumulte des mots qui frappent au cerveau pour connaître la lumière d’un écran ou d’une feuille vierge doit savoir de quoi il s’agit ici : un déversoir une cataracte de bonheur une illusion de béatitude un espoir de lendemain qui chante et qui change (nouveau lapsus claviériste) pour enfin dire tout et le principal et aussi les intérêts pour que rien ne soit laissé au hasard surtout pas les non-dits c’est les pires des chancres de l’âme quand on les a bien ensevelis sous les tonnes d’amertume de scrupules et autres incapacités ils ressurgissent au milieu de vous et vos sentiments et vous gâchent les meilleurs moments de l’existence ceux où on pourrait enfin être heureux savourer la douceur d’une peau ou la lumière d’un matin dans les yeux d’un amant ou les reflets de cheveux d’enfants voilà patatras tout s’écroule si un non-dit traverse la scène et vous empeste de son haleine fétide et détartrante…

Donc halte aux taiseux et autres silencieuses, maintenant place aux mots pour dire ce qui me passe par la pensée cette étrange contrée où je ne rencontrais un temps que les souvenirs de temps trop durs pas assez ou mal accomplis maintenant je sais que j’ai le droit j’ai atteint le pouvoir de reprendre là où je l’avais laissée ma prose inassouvie mon délire verbal ou plutôt écrit pour ne gêner personne qui ne veuille pas entendre –sinon il peut encore faire semblant – non là j’écris donc qui m’aime me lise sinon allez tous vous faire regarder ailleurs il y a sûrement plus à votre mesure ; moi ici çà me suffit ; j’espère qu’à vous aussi, quand même !!

Le plus dur à gérer étant quand dois-je m’arrêter est-ce quand mon amoureux va se coucher est-ce quand mes yeux clignotent est-ce quand l’écran me paraît trop lointain pour seulement que les lettres s’affichent encore malgré les impulsions données sur les touches est-ce encore lorsque l’aube pointera et me dira alors là tu déconnes vraiment, comment peux-tu être aussi égoïste et ne pas t’être rendue compte que tout à l’heure au petit dej’ au boulot à la cantine ou même après tu ne sauras plus donner de toi pour tes clients tes enfants ton amoureux ou tes copines tellement tu auras tout donné ici maintenant à ton clavier tes phrases et tous ces mots qui ont giclé t’ont forcée comme obligée ou presque comme violée de tant de possession de ton esprit de tes doigts de tes mains qui grignotent les touches qui dévalent les espaces et ne font qu’hésiter parfois sur un accent, une cédille ou quelque halètement de poignet qui n’en peut plus çà y est, c’est çà qui m’obligera à dire stop çà suffit pour aujourd’hui : la crampe de la débutante, de la revenante à l’écriture qui a subitement cru que tout était possible à nouveau, l’écriture au km comme si on était encore en 2nde après le devoir de maths bâclé toute façon je m’en fous ce qui me plaît c’est écrire et dire et encore laisser parler les mots parce que çà au moins c’est la vérité vraie ce qui sort de mon cœur et de mon esprit et à bas les obligations scolaires et toutes les conneries que ma mère et les profs et tous ces gens voudraient me voir faire et avaler et remâcher et recracher peut-être aussi tant que j’y suis !!!

Là au moins, c’est moi, presque quarante ans maintenant, qui me dit « allez c’est bon tu peux te lâcher les mômes sont chez leur père ou ceux qui prennent le relais pour lui et en bas ton amoureux travaille lui aussi »… Lui c’est manuel, c’est les cordages, bon d’accord, alors moi je peux me laisser aller cinq minutes, là çà doit faire presque une heure que çà dure mais c’est pas grave tant que çà coule tout seul faut laisser, faut pas freiner, surtout pas de non-dit et pas de barrière à l’expression il paraît que ça tue l’inspiration et l’imagination.

Bon après il y en aura sûrement pour trouver çà nul et pas élégant comme style et surtout illisible et même si, qu’est ce que çà peut me faire ??? L’essentiel je crois que ceux-là l’ont pas encore bien percuté c’est que je peux enfin lâcher prise, ne plus retenir les mots et les laisser aller où bon leur semble c’est à dire s’ils veulent aller sans point ni virgule ou bien en travers ou les uns avant les autres pour ne pas qu’on comprenne tout peut-être que c’est une stratégie de leur part… je crois beaucoup à la liberté laissée à chacun de s’exprimer et donc pourquoi pas aux mots ? Après tout c’est par le mot que tout a commencé, non, la Genèse tout çà s’il n’y avait pas eu le mot pour la raconter on ne serait rien on ne saurait rien et tout serait annulé et on aurait l’air bien avancé, non ?

Donc, libre aux mots aux phrases de composer leur symphonie leur requiem leur mélodie ou leur fredonnement comme ils veulent moi je suis juste leur outil ma main mon cerveau au service des mots qui veulent sortir…

Bien sûr après on pourra voir à ordonner un peu tout çà pour toucher le plus grand nombre mais après tout si çà leur plaît d’être sortis comme çà tout d’un coup sans prévenir et qu’ils veulent nous dire quelque chose de sensé c’est bien à nous de faire un effort après tout çà fait tant de temps qu’ils sont utilisés servilisés ou plutôt asservis qu’on leur fait dire ce qu’on veut tantôt des tyrans tantôt des poètes malheureusement plus souvent des dictateurs que des chanteurs et encore des fois les uns valent pas mieux que les autres alors bon quoi çà y est on peut bien leur laisser un peu le pouvoir, non … ???

Donc, les mots qui m’ont suivie, aidée aimée ou maltraitée dans ma tête dans mes écrits dans mes oraux dans tous les moments de ma vie où j’ai voulu exprimer et que tout çà m’a manqué ou étouffée ou démangée ou dérangée que dois-je en faire les taire les maltraiter à mon tour les ranger oui mais comment et où ou alors faut-il les remiser quelque part en attendant mais voilà çà finit toujours par sentir le renfermé quand on les laisse enfin sortir donc autant leur faire prendre l’air une bonne fois pour toute et après au moins on sait qu’on ne pourra plus jamais les laisser à l’abri des regards des envies des intérêts mais d’ailleurs est-ce capital ou primordial ou même tout bêtement vital ??? – le dernier lapsus du jour, viral avait écrit mon clavier emporté par tant de doute de hâte et de gêne aussi peut-être ?

Est-ce que c’est viral, docteur, est-ce que je dois me protéger ou plutôt empêcher les miens d’être en contact avec une telle vilenie la passion des mots qui courent sur l’écran et me font haleter et la crampe qui me reprend et cette douleur lancinante dans la nuque çà y est la cervicale qui ne m’avait pas fait signe de vie depuis des décennies ou presque, elle est là, bien vivante, la saleté vivement le prochain rendez-vous chez l’ostéo au moins lui saura la mater !!

En attendant cette interrogation sans réponse cette question sans solution ce problème qui se maintiendra dans un coin du clavier jusqu’à la prochaine fois : est-ce humain de vouloir s’en remettre de la sorte aux mots et à leur délire pour tenter de comprendre ce qui m’habite et me fait haleter en moi-même de vie de pulsion de recherche sans cesse harcelante et toujours chancelante jamais assouvie toujours en quête de je ne sais quoi qui me fasse enfin comprendre résoudre solutionner cette équation maudite et pourtant si chérie au long des années et des feuilles griffonnées : qui suis-je pourquoi m’a-t-on fait naître sur cette planète où et quand se lèvera le jour béni où tout sera clair en moi et où je comprendrai enfin ?

Aucune hâte pourtant devant cette interrogation primordiale primale et primaire… juste quelque anxiété à trouver le bon chemin pour arriver à la bonne réponse, mais pas plus de tension que çà devant la route qui s’ouvre ou se découvre à peine, juste l’envie impérieuse, impétueuse et intense de trouver, de chercher d’abord évidemment et aussi de récolter un à un les grains de savoir et les pépites de connaissance pour un jour accéder à un certain nirvana…

aujourd'hui, 26 février 2008

Bon d'accord, c'est pas un titre très marrant... on en a vu des plus fun, mais c'est juste pour dire qu'aujourd'hui, j'ose prendre le clavier directement sur deizlevr au lieu d'ouvrir sagement une page Word, de pianoter-lire-corriger-copier-coller-effacer-relire et enfin, dans un dernier Ctrl C + Ctrl V, vous présenter tout ça...
C'est-y que j'aurais eu mon petit signe, alors ? Ben ouais, j'avoue que ça m'a fait drôlement chaud au coeur, merci tout plein M. le Toulousain, pfffh... j'en suis toute retournée !...
Avec attention, même, il a dit, le Monsieur !!! Ouuuuuaaaaaaahhhhhhh !!
Bon, nan, promis, c'est tout, après je redeviens une femme mûre et posée qui ne part pas en live au moindre regard ou frôlement...
Tu as raison, Manu, je le sais, ça ne changerait rien profondément à ma vie de me laisser aller autant que je veux à aligner sur le papier les pensées et les élucubrations qui me traversent l'esprit, sauf que ça me boufferait juste le temps et l'énergie que j'accorde pour l'instant et depuis plus de quinze ans à (dans l'ordre ou à peu près) : mes mômes, l'homme que j'aime, notre maison, mon potager en devenir, les piles de livres à lire, mon corps (quand il me reste cinq minutes).
Donc mon esprit et tout ce qu'il concocte restent à la traîne, comme le dépôt d'un verre de cidre du fermier d'à côté. Bon, d'accord, cette image ne parle peut-être pas beaucoup aux gens du sud-ouest, mais j'ai cru comprendre qu'il y a pas loin de mon premier lecteur une Bretonne d'origine (ou de coeur ?), elle saura bien expliquer ça !

Donc, pour ne pas faire de ce post uniquement une réponse à Manu Causse, je rajoute ce qui suit... un extrait de ce que j'écrivais il y a déjà quelques temps... pfffh, ça nous rajeunit pas, mais là faute de place dans le planning j'ai pas le choix, les kids se réveillent, 'faudrait pas que je rate ça : la première empoignade de la journée autour du bol d'Ovomaltine.
A très bientôt vous lire et vous savoir aimer ce que j'écris, ça fait du bien !!!

dimanche 24 février 2008

Le 24 février 2008


Ça fait comme une déchirure en moi, une espèce de tiraillement douloureux et lent à la fois, comme une pièce de tissu qui se délaminerait tranquillement en faisant une petite poussière fine qui se déploie dans l’air.

Je me sens oppressée et essoufflée à la fois, apeurée aussi un peu, triste tout au fond.

C’est comme un rêve de gamin qui s’écroule, une envie immémoriale qui s’estompe dans le lointain de la vie quotidienne, une chimère en désagrégation … Une partie de moi se meurt, quelqu’un quelque part a fini d’exister, je ne serai jamais cet être-là.

J’ai mal, je pleure et me lamente en moi-même, absorbée dans la contemplation de ce désarroi, pourtant avide de continuer quelque chose, de reprendre un cours quelconque de ma vie, toucher à nouveau à cette perspective d’avoir ma place ici.

Lire est parfois très éprouvant, trop impliquant. Je me sors de « Les revenants » et « La chambre dérobée » de Paul Auster avec beaucoup de peine, me remémorant « Cité de verre » et ayant du mal à reprendre ma respiration après cette trilogie new-yorkaise.

Trop de belles expressions, de mystères poétiques et philosophiques à la fois, une foison de pensées sur l’écriture et la littérature qui me font douter de moi, de mes écrits et de la place que devrait prendre cette activité dans ma vie… ou plutôt que je devrais lui laisser prendre… ou peut-être que je devrais lui donner ?

Aussi le blog de Manu Causse, si rempli de vie, d’émotions, de romantisme à la fois que de fantaisie … et tout ça si bellement exprimé, si radieusement sincère et proche de ce que j’aimerais vivre…

Au lieu d’un tel monde pour moi, c’est la routine tranquille d’une vie calme et axée sur le travail de mon amoureux, la maisonnée qu’il faut faire tourner sans accrocs avec un ado et un pré-ado bien étranges par moments, sans moyen ni temps pour leur faire partager mon envie de découvrir le monde, mes idées saugrenues de quarantenaire qui se sent encore des poussées d’acné, mon émerveillement pour un monde qu’on peut rendre marrant si on se bouge un peu.

J’essaie de ne pas faire le compte de toutes les copines qui ne m’appellent plus, de toutes les nuits où je ne goûte plus au plaisir échevelé connu entre 18 et 35 ans, de tous les instants de magie offerts du temps où je croyais aux signes du hasard et à la complicité avec un doux-dingue.

Une grand-mère de mes enfants me disaient l’autre jour que je ne peux pas prétendre à connaître encore la fantaisie et l’humour auxquels je me suis abreuvée pendant toutes ces années, que j’ai droit au calme et à la rigueur d’un autre amour, que je devrais même m’estimer drôlement chanceuse de pouvoir y avoir accès car ayant échappé de justesse au grand n’importe quoi de l’artiste écervelé.

Alors j’écoute les dessins sur les murs en bois de notre home sweet home me raconter des histoires de steppes, de neige et de forêts polonaises, j’essaie de trouver dans le rayon de soleil printanier la réponse à ces interrogations stupides et je finis par me raconter n’importe quelle suite aux moments ratés ou tordus de mon existence.

Ça pourrait bien donner quelque chose un jour, si seulement j’arrivais à attraper les mots avant qu’ils ne tombent dans les oubliettes de ma fainéantise.

J’essaie de rester un peu au clavier quand le bon vin ou une prise de tête me font sortir les mots, mais je n’arrive pas à lutter contre la fatigue de ces journées d’activités répétitives, je me laisse aller à l’appel de la couette ou du farniente en canapé…

Et tous les mots restent planqués en moi, bien au chaud, bien encombrants, je redoute l’instant où il leur viendra l’idée de sortir et de me harceler pour prendre consistance. Je crains ces minutes autant que je les désire, en fait, car il me semble qu’elles pourraient être les bases de longues heures de bonheur à écrire enfin, avec une raison, un but, une finalité : Le livre.

En attendant je vais maintenant réchauffer la potée d’hier soir, faire une tentative de jardinage et quelques investigations dans les méandres de ma culpabilité, à moins que je ne reçoive le signe qui me permettra de remonter la petite colline de mes élucubrations d’écriveuse aujourd'hui transformée en falaise abrupte …

Je garde espoir.

vendredi 22 février 2008

Quel désordre !!

Bon, voilà, j'ai donc mis en ligne quelques pages de ce deizlevr qui n'en est pas vraiment un puisque tenu de manière si irrégulière...
Mais bon, je pense que vous y arriverez quand même, un peu de bon sens, allez, tout est daté, y a qu'à commencer par la fin...
et puis si ça vous donne envie d'en lire davantage, et ben vous pouvez commenter...
Merci de ne pas vous gêner !

Pour l'heure je fais comme d'autres, un peu de vacances avec mes kids et on verra bien si la boîte à lettre est remplie à mon retour !!

Kenavo !

en janvier 2008

J’écoutais ce matin Dominique de Villepin nous expliquer qu’il avait commencé à écrire un livre lorsqu’il était Premier Ministre, ouahou, bravo Monsieur, mais quand dormez-vous ? et n’aviez-vous pas à l’époque ce qu’on pourrait penser être un métier très prenant ? et une famille ? et un corps qui a aussi besoin d’exercice et d’être nourri au moins deux à trois fois par jour ???

Pour moi, lecture et écriture sont deux activités semblables, complémentaires mêmes…

Le fait est que seuls quelques happy fews se permettent d’en faire leur métier, les autres ne pouvant que s’efforcer de concilier vie quotidienne, routine ou appelez ça position sociale défavorisée si vous voulez, avec leur vie intérieure, leur soif de connaître autre chose, d’autres pays, d’autres destinées …

J’en suis, et j’en souffre, mais pas trop quand même puisque j’ai l’immense privilège d’habiter à côté d’une formidable bibliothèque de village, d’avoir des parents lecteurs et amoureux des belles lettres, de savoir forcer le sommeil dans ses retranchements pour finir un roman ou une biographie dans la nuit avant de préparer le petit-déjeuner pour ma smala.

le 21 janvier 2008

215ème anniversaire de la mort de Louis XVI.

à la radio, les monarchistes parlent après le révolutionnaire du XXIe siècle.

Puis on annonce la naissance d’un nouveau magazine de journalisme. J’entends les noms aimés de St Exupéry, Albert Londres … je pense à Jack London, Hemingway, JF Kahn, qui a les mêmes initiales qu’un président des E. U. , mais aussi d’un aéroport mondialement connu, car aux abords de la (l’ex ?) capitale du monde.

Petite digression en imaginant des extra-terrestres qui s’émerveilleraient de notre sens de l’organisation en pensant que nous attribuons des initiales pour désigner nos aéroports…

Puis je te croise, un peu blafarde, encore embrumée des restes d’un week-end de bamboche ? de tristesse ?

- Ca va, copine ?

- Oui oui… ça va !

- Bon … bon courage !

- Bonne journée !

Vite partir, vite continuer, vite quitter cette brève rencontre, rentrer dans sa coquille et surtout ne pas en ressortir, sous aucun prétexte, pas de faille, pas de sortie de cette brouillasse de chienne de saleté de spleen.

J’imagine en continuant mon chemin qu’en fait tu es à bout, que quelques pas plus loin tu t’écroules intérieurement,, les larmes coulent sur tes joues blêmes, et tu suffoques. D’un revers de main, tu tentes bien de refouler ces fils luisants qui s’échappent de tes yeux noyés, de ton nez rougi, de tes lèvres gercées…

Encore une rue, un carrefour, ta voiture, tu t ‘effondres, les mains agrippées au volant puis glissant sur tes genoux, molles, tristes, comme abandonnées par ton être en détresse.

Le fil de tes pensées se perd dans les méandres de ton coup de blues, ce n’est plus un petit ru de lundi matin difficile, c’est déjà la rivière des soupirs, le fleuve du désespoir.

Je m’arrête dans un bistro pour un petit noir qui réveille, chasser ces idées et moucher la fin d’une marche dans l’air humide de ce début de semaine.

Je recherche les bribes de restes de rêve qui s’enfuient à mon approche, le réveil a coupé net une bizarre épopée à la recherche de ma voiture garée au rayon fruits et légumes du supermarché … Je réclame l’aide d’un copain à son bureau, qui s’est transformé en un immense entrepôt rempli de bateaux sur des remorques, des voitures et divers engins de manutention.

Je ne sais plus ni quel jour nous sommes, ni ce que je dois faire, retourner dans mon rêve ou prêter attention à ce que me raconte la radio si bien réveillée, elle !

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Les gens se pressent doucement dans la rue, les marchands en sont déjà au sandwich du milieu de matinée, les chalands traînent devant les étals un peu dégarnis, chacun essaie de relancer son corps après la pause dominicale, on sent comme une léthargie ambiante, l’air doux bien qu’on soit au cœur de l’hiver nous a tous anesthésiés, la sève n’ose pas reprendre son chemin dans les couloirs de nos vie de peur d’un coup de gel brutal qui stopperait à tout jamais l’élan de vie du printemps.

Les gens des terres sont venus à la ville pour se voir, prendre les nouvelles, acheter les denrées qu’ils ne trouvent pas dans leur campagne, humer l’air citadin pour ne plus se sentir si campagnard… Prendre un peu l’aspect d’une personne civilisée…

Les hommes commencent à aligner les verres de blanc, de rosé, les demis de bière et les canons de rouge.

Il est dix heures, partout en France c’est la même scène, dans tous les bistros il y a une Christiane ou une Solange qui sert à Dédé ou à Vonvon sa dose d’alcool pour démarrer la journée.

Ces vies accrochées à des gouttes maléfiques, un atavisme abominable les englue dans ce défilé de verres ininterrompu.

Quelques uns ont choisi de l’accompagner d’une autre forme de suicide à long terme, quelques bouffées de cigarettes s’échappent mentalement de leurs esprits imbibés.

L’interdiction de fumer est en application depuis trois semaines, c’est pour cette raison que je peux m’asseoir maintenant sans appréhension pour prendre un café… Auparavant, la fumée si désagréable me retenait tout l’hiver de fréquenter ces établissements, il me fallait attendre les beaux jours et la réouverture des terrasses pour pouvoir savourer les instants de pause corsés.

A la porte du bistro, une affiche des buralistes bretons invite le gouvernement à rétablir la liberté de fumer dans ces lieux où l’on se tue à petit feu… il ne me semble pourtant pas que ce commerce soit près de péricliter tant le tiroir-caisse tinte sans arrêt au passage des clients, fumeurs comme alcooliques.

Quelque part en décembre 2007

Parfois elle souriait, et c’était comme une envolée de papillons multicolores dans un ciel d’été.

Sinon elle se tenait un peu voûtée, le regard perdu dans un triste désert, on l’aurait dit rescapée d’un cataclysme d’un autre temps.

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13/12/07

ballade à grandes enjambées rapides à travers les bois gelés.

Les feuilles des châtaigniers sont toutes blanches de givre et crissent sous mes pas. Les branches, tombées pendant la tempête, jonchent le sol d’obstacles feuillus ou plutôt couverts de lierre – car les dernières feuilles de la belle saison se sont envolées avant que les branches ne tombent, poussées par le vent violent du premier décembre.

L’air picote, le ciel est d’un bleu pur et comme transparent.

J’imagine la mer, plate et comme huilée par cette pellicule d’air froid qui a recouvert tout le paysage. Tout brille, comme le soleil qui maintenant me réchauffe à travers la vitre.

Le retour à l’humain, aux hommes attablés pour un repas ouvrier, est brutal car bruyant, enfumé, je reste en esprit dans l’air froid du sous-bois. Seule femme parmi plus d’une soixantaine de convives, je m’évertue à faire abstraction du bruit des conversations, des fourchettes qui heurtent les assiettes et de la fumée des cigarettes qui embrume l’atmosphère.

11 décembre 2007

Pourquoi ? Telle une question lancinante, la même, toujours la même. Essayer d’y répondre, s’efforcer de trouver la solution à l’éternelle interrogation. Ne pas se laisser influencer par l’opacité d’une routine ni par l’apparente indifférence de son entourage.

Ne pas croire non plus que c’est une juste punition, le prix à payer pour une faute passée, encore moins un acompte pour un péché à commettre.

Pour y voir clair, se retrancher du monde, donc, ne plus se laisser envahir par le bruit des gens actifs, des lieux agités, de l’espace occupé. Trouver un refuge, une halte paisible, un endroit tranquille pour poser ses valises de doutes et pouvoir en les ouvrant éviter le risque de voir s’envoler toutes les données de cet étrange problème.

Pour être sûr de ne pas enfreindre ce principe, ne dire à personne où l’on est… de toutes façons, apparemment, il n’y a aucun être vivant aux environs pour s’inquiéter de cette absence. Le tableau n’est pas moins vivant si l’un des figurants manque à l’appel.

Aller là où l’on est inconnu, étranger, sans passé. Faire le minimum pour ne pas attirer l’attention, c’est à dire avoir les politesses requises pour acheter son pain et recevoir son courrier, peut-être assister à un ou deux offices histoire de connaître un peu les visages des croyants de l’endroit, lire parfois un journal en s’attablant au bar-tabac pour ne pas laisser croire qu’on est indifférent à la vie communale.

Marcher, divaguer, de hameaux en collines, de prés en chemins de traverse, arpenter, musarder, errer. Car dans l’errance est la source de la première réponse. Dans les arbres au bord de la route, dans la couleur du ciel au soir d’un jour de pluie, dans les nuances de vert selon les champs qu’on longe, on peut trouver des parcelles de raison. Laisser son esprit vagabonder de ruisseau en plage déserte, de rocher en verger, puis, de retour à la cheminée qui apporte la chaleur, laisser toutes les idées mûrir et donner leur fruit de connaissance.

Toujours se taire, ne pas laisser sortir de soi vers d’autres une quelconque trace, le moindre signe de réflexion ou de sentiment. Ne donner à personne un avis, une remarque, qui pourrait se perdre en l’autre et trahir sa propre identité. Garder en soi pour retranscrire plus tard, à l’abri des regards, les émotions, les ressentis, les visions.

Se plonger alors corps et âme en soi-même, des journées entières, des nuits peut-être aussi, laisser les mots, les pensées prendre le pouvoir pour être guidé vers une réponse, une explication première, une accroche qui permettra de cheminer vers la vérité.

Savoir s’écouter, puis se mettre en mots, en phrases…

Un jour, décider que tout a été exploré, recensé, exprimé. Mettre en forme ces écrits, relire et enfin comprendre.

Ou alors ne jamais savoir quand arrêter cette recherche, rester en quête jusqu’au dernier souffle… et partir pour un autre monde où peut-être on saura enfin.

Je ne sais toujours pas, je cherche encore, j’aimerais trouver, mais j’ai peur de découvrir qu’il n’existe aucune réponse.

Alors je me donne des rôles, une importance, une raison de ne pas me retrancher de toute vie sociale ou affective qui me permettrait d’être en condition d’avancer.

J’ai créé autour de moi les obligations et les relations qui m’obligent à être présente au monde, à ne pas céder à cette exigeante tentation de retrait introspectif.

Alors je traîne, de feuillets noircis en textes mal ficelés, je rechigne à l’un comme à l’autre, être dans la norme ou marginale, céder ou résister…

Le 10 décembre 2007

Vingt ans ? oui, il y a vingt ans. Et après ? Qu’est-ce qu’il est censé se passer après ce chiffre rond d’années, de saisons ? Quarante équinoxes, quarante solstices, autant de semestres…

Et alors ? Est-ce qu’on est plus malin au bout du compte ? Est-ce que je ne pourrais pas écrire aujourd’hui encore les mêmes mots, les mêmes pensées qu’à l’aube des premières rides ?

Vingt ans, le crépuscule de toutes mes illusions, l’aube d’un âge désenchanté où les réveils se font déjà pâteux, hasardeux, douteux de tout dès l’ouverture du premier œil.

La pénombre de la chambre cache forcément une puissance maléfique qui va surgir et me happer pour m’entraîner vers les bas fonds dont je ne ressortirai jamais vivante.

Le premier rayon de soleil transperce l’air vicié de la chambre pour mettre en relief les traces d’une nuit de soupirs et de pleurs.

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Non, je ne suis pas en vacances, moi non plus. J’ai dans la tête des milliers de mots, des kilomètres de phrases qui n’en peuvent plus de s’enrouler autour de ma gorge, j’ai même l’impression qu’elles tissent mon linceul, un beau tissu richement ouvragé de pensées, de paroles, de non-dits, qui m’étouffent peu à peu.

Les dompter, les faire sortir de ma poitrine, les hisser à bout de bras vers la blancheur d’une page, le scintillement d’un écran, c’est un vrai travail, qui commence bien avant même que je ne me réveille, qui hante chacune de mes nuits, tous mes rêves et mes réveils aussi.

Si j’ai besoin d’une caresse, du silence ou d’un rayon de soleil pour apprécier cette nouvelle journée, c’est pour en saisir l’énergie qui me mènera peut-être, aujourd’hui enfin, vers l’aboutissement de ces années d’écriture.

Alors ne me fais plus le plan de « celui qui se lève tôt et a besoin de faire du bruit avant 9h » pour exister… Tu es bien plus que cela à mes yeux, dans le fond de mon cœur et sur mes livres aussi.

Mais si des paroles agacées ou un énervement soudain viennent heurter ma sensibilité, prendre la place de la douceur et la compréhension, alors les monstres se déchaînent en moi, j’ai une vision terrible de plaie béante, celle-là même que j’arrive à suturer si le temps m’est donné de saisir le bon fil et la bonne aiguille.


Ce matin m’a ensevelie sous les ondes négatives du mini-séisme émotif, quelques mots et toute la volupté d’un éveil sans alarme ni horaire s’est évaporée dans l’air surchargé de ton agacement.

Oui, je veux être tranquille pour déjeuner, oui, j’ai besoin de quelques dizaines de minutes supplémentaires pour trouver le moment propice où saisir mon stylo et faire parler ma main…

Oui, il me faut du silence pour atteindre la qualité d’environnement qui me permettra de mettre en ordre les pensées et les rêveries du réveil pour démarrer une nouvelle page.

Depuis plusieurs mois je me donne toujours un délai, une nouvelle échéance, mais maintenant j’ai ce sentiment d’urgence qui me saisit et me harcèle quand je me laisse aller à penser que ça pourrait être ça, mon métier, mon activité, ma façon d’être dans le monde.

Chacun doit tenir son rôle, je dois assumer la place que j’ai cherchée pendant tant d’années et que je pense avoir trouvée, là, assise avec un bloc de papier ou un clavier entre les mains.

Mais le temps défile, vite, beaucoup trop vite, m’angoisse et me panique à l’idée de ne jamais franchir le gué, ne jamais réussir à mettre en forme définitive tous ces feuillets, ne jamais fermer l’enveloppe sur quelques dizaines de pages qui diront à un éditeur tout ce qui dort en moi.

J’arrive au moment fatidique, décisif, où j’ai trouvé l’énergie, le courage de me lancer, prête à reprendre en pleine tronche, façon boomerang, le pavé qui n’aura pas plu ou paru intéressant… Espérant, quand même, rencontrer la compréhension, l’intérêt qui validerait ces années de gribouillage, de doutes et d’espoirs, d’illusions et de magie.

Peut-être en fait devrais-je te remercier de m’avoir délogée de ma quiétude ce matin, de m’avoir incitée à prendre mon vélo plutôt que mon clavier pour aller m’épuiser physiquement, ressassant les phrases pour qu’elles courent plus vite – maintenant que l’orage est passé – de mes doigts vers la page neuve.

En roulant, j’ai revisité les méandres de certaines relations, amicales, professionnelles, amoureuses… Les kilomètres se sont enchaînés sans peine, contre ou avec le vent, les roues bien alignées sur la route, je fixais les graviers qui défilent sous mes pieds, comme des millions d’étoiles filantes – mais impossible de faire un vœu, trop de vitesse, trop de graviers.

Quand le regard se porte en avant, à quelques mètres du guidon, chaque aspérité de la route est comme figé. OK, c’est là que dans quelques secondes je passerai, cette tache blanche dans le goudron va se transformer en comète sous mes roues. Un regard et c’est comme le but à atteindre, précis, immobile, soudain en mouvement, inaccessible, car déjà dépassé, à nouveau figé, là où on vient de passer, déjà loin derrière.

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maintenant, quelques heures et un bon repas plus tard, je m’enrhume doucement à regarder de mon canapé les nuages me voler les rayons d’un soleil d’hiver bien trop bas pour me réchauffer.

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Quand je pédalais sans but, l’envie m’a effleurée de me diriger vers le centre ville, un bar où me poser pour reprendre mon souffle et coucher sur le papier mon énervement, ou bien pousser la porte de l’ANPE pour les supplier de me trouver un boulot de secrétaire qui me prendrait tout mon temps « libre » et m’éviterait ainsi de rester dépendante … de quoi ? de quoi ? De moi, je pense, tout simplement, de mes pensées envahissantes et de cette inaptitude à me concentrer une bonne fois pour toutes sur ce que je dois faire, comment je dois le faire, etc.

La barrière de bruit de la voie rapide m’a arrêtée, j’ai fait demi tour au milieu de la départementale et ai enquillé la première voie communale à droite, pour me perdre entre les champs et fuir cette société de mouvement furieux… retrouver le sens de mes pensées et retourner à mon clavier.