dimanche 16 décembre 2012

Fin du monde J-5

en cette presque fin du monde (J - 5) annoncée depuis des mois, la teneur de mes propos pourra paraître facétieuse, hautement d'actualité ou tristement débile, c'est selon ta propre humeur que je te laisse, lecteur, dompter ou laisser vaquer à ta guise.

c'est juste une sensation, quelques bribes de pensées, de vagues idées d'une nouvelle vie qui pourrait commencer.

c'était il y a huit ans :
Maintenant que je sais que je ne suis pas Wonderwoman, tout devrait être plus facile.


Il m’aura fallu quelques années, quand même, pour me défaire de ce sentiment puissant de supériorité, de perfection ironique et désabusée… de la même manière que j’ai toujours cru qu’un de ces jours je me retrouverai planquée dans une cave ou les décombres d’un aéroport pour cause de grave catastrophe climatique, qu’un désastre géo-politique me mettrait enfin dans l’action urgente de survie au lieu de devoir me coltiner avec la réalité bassement routinière et parfois si lancinante du mal-être.

Pourquoi j’ai cru si longtemps à cette espèce de sauvegarde ultime, comment j’ai pu me sentir à l’abri de tant de connerie humaine et de laxisme sentimental, je m’en étonnerai je crois de nombreuses années encore. Avoir eu cette quasi-certitude de pléni-potentialité vis à vis de tout ce qui m’arriverait et de presque tous les êtres que je côtoyais m’a ôté tout désir d’agir réellement sur le chemin de ma vie, m’a empêchée de voir en face les réalités trop douloureuses ou médiocres qui ne faisaient que me rabaisser au lieu de me grandir…

Je n’ai certes pas fini de croire que mon cerveau peut démêler l’écheveau de la vie plus vite que le commun des mortels, je pense encore qu’un de mes regards peut appréhender plus que n’importe qui la magie du monde et que mon sourire est largement suffisant pour que j’accède régulièrement à l’essentiel de ce que je désire dans l’instant… mais tu m’as appris involontairement ces dernières semaines que je ne retrouverai jamais la douceur de tes mains sur mes hanches, la chaleur de ton amour en moi ni le vertige de ton extrême jouissance, et çà, ça veut dire que je ne suis pas toute puissante.

Le choix que j’ai fait de te quitter, de m’arracher à ton charme et tes changements d’humeur, à la certitude de vieillir à deux, aux tranquilles routines de l’amour quand on veut, au bonheur d’élever deux bouts d’humain sur cette terre incertaine, cette décision me permet aujourd’hui, brutalement et progressivement à la fois, de prendre conscience de mon manque de réalisme ces dernières années, de mon insouciance face aux hasards de la vie qui n’en sont finalement pas tant que ça.

J’ai réussi à me voiler la face tant d’années que je ne peux imaginer maintenant combien de temps il va me falloir pour comprendre et réussir à agir dans le bon sens, à quel moment je serai enfin prête à vivre simplement, à moins que je ne le fasse déjà depuis ce jour où j’ai décidé de ne plus t’aider, de ne plus être à tes côtés jusqu’à la vieillesse et la mort ?

Je pense en tout cas qu’il va m’être plus doux de vivre pleinement ma vie de femme et de maman sans avoir à assumer celle d’épouse-amante-infirmière-psy-mère-frangine que tu m’avais attribuée dès le début de notre relation, sans que je m’en rende compte puis sans te soucier si cela me convenait, ni si cela t’aidait réellement à vivre et ne nous mettait pas en péril tous les deux.

Aujourd’hui le péril ne fait plus partie de mon existence comme élément potentiellement salvateur, j’ai cessé de croire que j’aurais à me sauver avec mes enfants d’une catastrophe naturelle, parce que ça y est, c’est fait, le cataclysme que je redoutais, c’était toi, et j’ai demandé le divorce le mois dernier.

Et me voilà ce 16 décembre 2012 à remâcher encore et toujours.
enfin maintenant je ressasse plutôt mon incapacité à mener mes deux bouts d'humain sur le chemin que je croyais tout tracé pour eux.
Et les deux autres petits blondinets qui se sont faufilés dans ma vie depuis ne me semblent guère enclins non plus à suivre mes conseils et préceptes plus d'une dizaine d'années encore.

Je m'essouffle, plus tôt que prévu, sur la route poussiéreuse mais parfois si joyeuse de la vie.
Je revois des choses qui ne me sont pas arrivées, je rêve d'intenses moments de quête incertaine d'un monde meilleur, j'écris encore et toujours les pages d'un livre inconnu et loin d'être achevé.

J'écris dans l'urgence, les doigts fourbus pianotent comme en perdition, les mots s'enfuient à mon approche, seule la lecture trop rare d'un roman ou de quelques poèmes attise à nouveau les braises qui couvent toujours dans un recoin de mon esprit.

Je ne sais pas remercier, reconnaître la beauté des instants de paix offerts pourtant par paquets de cent tous les jours.

Je renie mes origines, la splendeur de la côte au petit jour, les magnifiques brumes de fin de journée entre les pierres ancestrales... Je m'astreins à vivre chaque jour comme le seul et unique, déçue à chaque réveil que la noirceur de la routine recouvre toujours et encore ma fenêtre sur le monde.

Mais j'essaie à nouveau. Demain encore. Si rien ne stoppe la terre dans son giratoire élan. 

L'orage gronde encore cette nuit.



lundi 18 juin 2012

salut à vous deux qui avez choisi de nous quitter ce week-end.

Louis, je ne te connaissais pas très bien, mais ton père oui beaucoup mieux, ta mère un peu aussi. Je comprends pas bien pourquoi t'es parti, à 14 ans et demi, mais j'imagine la douleur effroyable de tes parents et proches et je hurle en moi-même cette infâme tristesse que rien ne saura jamais consoler.
Je garde de toi, parmi les images de mes enfants, celle d'un gamin perché sur un rocher sur la petite plage du chenal, c'était l'été 2001, tu devais donc avoir 3 ans et demi... t'étais un chouette bonhomme, plein de malice dans les yeux, de la tendresse à revendre sûrement, et voilà t'es plus là.

Rom, toi je t'ai cotoyé du temps où tu faisais partie du domaine réservé des tour-du-mondistes, quand vous reveniez toi et tes acolytes avec des étoiles tropicales ou boréales plein les yeux, des chansons de gabier et le goût du rhum paille sur les lèvres...
Je viens de lire un magnifique mémo de ton co-équipier Gaël sur la Whitbread à bord de Charles Jourdan où tu n'apparais que comme cuistot, mais Eole et Neptune savent bien que tu n'as pas dû laisser ton quart à un autre pendant tout ce tour du monde en course.
Me restent donc les souvenirs de soirées échevelées sur les quais, ici An Drinded ou là-bas à St Martin...
Et là t'as fait un sacré sale coup à tes potes, enfin de ce que j'en ai appris en cette belle journée de presque fin de printemps.

C'est pas cool les gars, je me sens misérable de vous savoir partis.