Samedi 6 mai 2017
L’air est mouillé de fin d’hiver, le vert encore tendre des
jeunes pousses arrache à l’aube les dernières bribes d’un sommeil haché.
Quelques feuilles mortes, rescapées du pragmatique
harcèlement du souffleur automatisé s’efforcent vaillamment de se fondre à
l’humus dans une ultime tentative de participation au grand tout.
Le ciel enlarme quelques yeux clignotants, la petite vitesse
engendrée par le pédalage énergique vers les copains, la cour de récré et les berlingots
au chocolat du goûter finit de décrotter les esprits embués par les rêves et la
chaleur de la couette.
Regarder son guidon, l’asphalte qui défile, guetter l’engin
vrombissant qui peut surgir au détour du
virage, se crisper un instant puis reprendre le contrôle, assurer stoïquement
le maintien de son équilibre tout en encourageant sa progéniture à bien garder
le cap, ses distances d’avec le bas-côté ainsi que (et plus encore) d’avec la
tentation de la ligne médiane.
Réfléchir à la journée qui commence, tenter de préserver les
pensées nées quelques heures auparavant, chemins creux et expéditions en
d’autres galaxies, mais se faire happer par le quotidien éternellement
renouvelé et se retrouver face au portail de l’école, bonne journée mon chéri,
je t’aime ma puce, fais-toi plaisir en apprenant le monde et à ce soir.