vendredi 22 février 2008

2 octobre 2007

Je suis lente. Le temps est mon ami. Je le regarde glisser entre mes doigts, tels les innombrables grains de sable de l’immensité du désert.

Je suis confiante. Je sais qu’il restera toujours au bas d’une dune, au creux d’une oasis, les quelques grains du temps qui me permettront de savourer encore la douce fuite du sablier.

Je suis rapide. Je lutte contre le temps qui file entre mes doigts, je me bats à chaque seconde contre l’angoisse de voir soudain le dernier grain m’échapper et m’entraîner dans sa chute ultime vers les profondeurs d’un gouffre infini, le trou noir de ma raison, l’engloutissement de ma conscience.

Je suis tranquille. Je sais en moi la présence tendre et apaisante d’une bienveillance attentive et prévenante. Je donne au monde mon regard confiant ; la nature le ciel et tout ce et ceux qui m’entourent me portent et me soutiennent pour une vie harmonieuse et sans appréhension. Je suis aimée.

Je suis angoissée. Ouvrir les yeux sur le matin est aussi inquiétant que les fermer face à la nuit qui vient. J’appréhende les hommes, l’air et le feu, les montagnes comme la mer ; tous les éléments me sont hostiles. J’étouffe en hiver, je grelotte en été. Les émois du printemps me harcèlent telle une torture de l’Inquisition, les douceurs automnales m’infligent les sévices de geôles démoniaques. Je ressens aux tréfonds de mon être la poigne harcelante d’une bête ignoble qui ronge et racle et rogne, me dépèce par l’intérieur de toute parcelle de vie, d’énergie, de force. Je suis béante, privée d’amour.

Je suis allongée, je m’étire et mon corps est long.

Étendue dans un pré, chaque parcelle de ma peau en contact avec le sol est le gué où migrent les millions de sensations, de cellules et de phéromones qui forment ma relation à l’herbe et ses habitants. Je suis tout entière une infime particule d’une des innombrables frontières entre terre et atmosphère, un minuscule point des immensités qui se côtoient et cohabitent depuis la nuit des temps.

Blottie sous ma couette, je peux connaître la volupté de la fraîcheur des draps à mes pieds en même temps que la douce chaleur du molleton enveloppant mes épaules. Je touche du bout de mes orteils l’extrême trame du drap, la ligne discrète qui sépare celui du dessous de celui du dessus, le bord plus frais où l’air ne s’est pas encore réchauffé d’un contact humain. J’effleure de la paume de mes mains dépliées le bois tendre de la tête de lit, je m’y appuie doucement, savourant cette sensation d’échange entre deux organismes vivants, mon être et le pin émigré de Suède. Je me remémore les tendres étreintes passées où mon appui s’est fait soutien d’un corps pénétrant le mien en souples ondulations.

Je suis debout. Mes muscles et mon squelette portent mon être vers l’infini du ciel, gardant par la plante de mes pieds le contact avec les origines terrestres. L’immensité des nues me rapetisse vers le sol, mon organisme, tassé et ramassé au ras des pâquerettes, s’efforce d’offrir à la grandeur céleste le plus grand nombre possible de neurones et autres fibres cérébrales, du plus près qu’il se peut concevoir, afin de toucher si possible, d’effleurer au moins, d’espérer en tout cas … la connaissance d’un ailleurs.

29 septembre 2007

La maison s’éveille doucement. Les oiseaux qui chantent depuis quelques heures ont eu raison de la nuit, ça y est, le soleil caresse la cime des arbres, les ardoises commencent à sécher, la rosée ne sera plus bientôt qu’un souvenir au sommet des brins d’herbe.

Le chat vient de rentrer de sa virée, il en est maintenant à finir de nettoyer son pelage en gardien précautionneux de son organisme fourbu. Bientôt il laissera à son tour les images et les sensations prendre possession de son être, revivre les courses nocturnes, les échanges félins et autres visions des dernières heures éveillé.

Je reviens lentement, quant à moi, de ce voyage intérieur qui m’a laissé cette nuit encore passer du rire aux larmes, des attentes angoissées au plaisir le plus charnel… J’aime ces moments tranquilles et pourtant presque fébriles où je remonte le fil d’un rêve pour tenter de retrouver quelques bribes de ces bonheurs fugaces, de ces étranges découvertes sur moi-même… et me donner les clefs pour mieux vivre ce jour qui se lève.

Il y a quelques heures, quelques minutes peut-être, j’étais cette femme désorientée qui cherche son ancien amant dans un fatras de vieux tissus, dans un coin d’un hangar abandonné, perdu au milieu d’un terrain vague au fin fond de nulle part.

L’angoisse de cette situation suintait par tous les pores de ma peau, entravant ma respiration d’une boule aux relents amers en travers de ma gorge. Dans cette réminiscence d’un amour à jamais et depuis bien longtemps éteint, je ne sais quelle était la douleur la plus vive : considérer en défunt l’objet de mes recherches, ou ressentir à nouveau la honte de ressasser une fois encore les regrets, remords, espoirs déçus et orgueil bafoué alors que la vie m’a offert depuis, à mes côtés, en moi, pour moi, l’homme qui m’accompagne à présent.

Cette plaie est donc toujours ouverte, non plus béante comme au premier jour, ni aussi profonde que pendant bien des mois, mais encore sensible à un regard, une parole, une attitude qui pourrait me rappeler, dans la journée, aux abords de la nuit, ce qui a été et ne sera jamais plus.

Toute la poésie, les sensations, les sentiments développés alors se sont évanouis, il n’en reste la trace que sur les papiers griffonnés, dans les archives de ma mémoire et de la sienne peut-être, que j’ai crue longtemps réservée à la tendresse et aux plaisirs que nous avons partagés du temps de notre entente.

Parfois je sais que tout cela est bel et bien dépassé, qu’il faut oublier, tourner la page et faire le deuil, tralala, mais qui peut empêcher mes rêves de m’apporter encore sans prévenir des pensées nostalgiques ou amères ? Le pire reste quand l’onirisme se fait érotique et que se renouvelle en moi l’idée d’un renouveau, d’une reprise de sentiments doux et plaisants… J’ai alors en me réveillant une insupportable sensation de gêne vis-à-vis de l’homme qui dort encore à mes côtés. Cette honte intérieure lui vaut alors un réveil en douceur, tout en caresses et volupté, je me pardonne ainsi mes écarts subconscients.

Souvent, de plus en plus heureusement, je vis bien, riant à la vue d’enfants qui grandissent ou savourant les délices qui me sont offerts de ne manquer ni d’un toit, ni d’un garde-manger rempli, ni d’un entourage prévenant. J’oublie alors ces vieux démons, j’efface prudemment les relents de souffrance et me concentre sur le bonheur présent.

22 juillet 2007

Bien trop souvent.

Bien trop souvent on se tait. On croit respecter le besoin de silence de l’autre, adopter une attitude plus calme, réfléchir tranquillement au cours des choses et aux souvenirs…

Pendant longtemps on pense qu’il vaut mieux taire les différences, les avis contraires, les manques et les peines (toutes si douces qu’on les croirait infimes).

Parfois, comme dans un éclair, ressurgit la peine, la vraie, l’angoisse du non-dit qui barre la gorge et étreint la poitrine, enserre le cœur à le faire exploser par les poumons, on dirait qu’on va s’éparpiller en mille puzzles que jamais personne ne saura reconstituer.

Puis vient le moment où un petit rien de regard, une ambiance ou quelques degrés d’alcool font remonter tel un plongeur en fin d’apnée toutes ces pensées, ces émotions cachées, gardées bien camouflées au fin fond du soi si branlant.

Tout d’un coup tout surgit, prend un sens et une consistance, celui des larmes, celle des sanglots. L’amertume envahit la bouche, les mains, la tête tout entière n’est plus qu’un feu de mauvais artifice, on s’en veut d’avoir attendu si longtemps, et pourtant on pensait au bien qu’on faisait, au calme qui régnait, au doux bonheur superficiel des belles journées bien lisses où aucune rancœur ne raye l’horizon…

Et patatras, tout craque et s’évapore comme une pauvre rosée perdue en plein milieu d’une journée d’août, les sentiments s’affolent et on ne sait comment, où, combien trouver de mots pour arrêter cette tristesse.

On parle, alors, en essayant de trouver les bonnes formules, les phrases qui ne blesseront pas, les idées qui feront leur chemin hors de soi, vers l’autre, en cherchant autant de chances que possible d’arriver au bout, à la fleur de sa peau, au bord de son âme, au cœur de ses émotions.

Et on continue d’avoir mal, de tant espérer sans y croire plus vraiment, de tant vouloir convaincre sans l’oser davantage… La bataille n’a pas lieu, puisqu’on refuse l’affront, on recule devant ses propres armes, on ne se saisit que de sa lâcheté au moment fatidique et on renonce avant l’assaut.

L’honneur d’avoir à se dévoiler entièrement est sauf, ouf, cette fois encore nul besoin d’exprimer pleinement, sereinement, en confiance, les mille menues broutilles qui ont peuplé nos rêves et nos cauchemars… On a sauvegardé l’essentiel, la paix apparente de relations tranquilles.

Le tumulte intérieur pourtant n’est pas apaisé, la vie est toujours aussi difficile en soi-même, les questions migrent d’un côté à l’autre du cerveau en faisant des escales désœuvrées dans le cœur, minent le fondement même de cette tranquillité si chèrement exhortée.

Envie de nouveaux départs, de trains qui traverseraient le pays du passé pour nous déposer sur le quai de la gare du futur, le bon, sans erreur ni hésitation.

Avec à la main le bon billet, dans l’autre le bagage idéal. Et à côté du compagnon qui va bien.


Pour le meilleur, après le pire.


17 ou 18 juillet 2007

En vacances à l’autre bout du pays. Voyage de 10 heures en voiture, pas d’autre activité que cérébrale, pensées, idées, souvenirs…

Les paysages défilent, m’étonnent ou me bercent d’une langueur de sieste moite, je dors, la nuque cassée, entre deux croisements de jambes et deux aires d’autoroute.

Mon esprit vogue de scènes passées en dialogues inachevés, ou même pas débutés.

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Au bout de quelques dizaines d’heures de ce régime de break, stand-by intellectuel et physique au milieu d’une vie très active, je décide de tout accepter. Cette formule a du mal à passer, mais c’est pourtant juste çà.

J’accepte les râleries, les mots tendres, les incompréhensions, les changements de programme, la chaleur de l’été, les non-dits et les bavardages.

Je prends tout ce qui vient, et ce qui n’arrive pas… sans dépense inutile d’énergie, sans amertume ni contrainte, sans espoir vain de voir mes aspirations profondes assouvies… Je vis, j’existe, je partage ma présence sur terre avec les êtres qui m’entourent, je donne mon amour et mon sourire à ceux qui en veulent. Si trop de tendresse, trop d’émotions restent bloquées en moi, elles sauront trouver leur chemin vers des cœurs en manque, le jour où il faudra… quand ça devra arriver.

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Tentative de laisser-aller, la vie, la nature, les ondes invisibles prennent le pouvoir total sur mon existence, je ne lutte plus, je garde l’énergie autrefois dépensée en vain pour de plus amples réussites… lesquelles ?

On verra bien.

mars 2007

En attendant le retour de mon bâtisseur d’amoureux qui nous peaufine un beau nid en bois, je m’assieds quelques instants au clavier, triste, fatiguée, comme au bout d’un rouleau dont je crois chaque matin au réveil qu’il a enfin été changé dans la nuit,…

Mais non, c’est toujours le même, je crois bien que tant qu’on ne sera pas dans la nouvelle maison je resterai comme çà, soudainement et par moments sans énergie et comme en train de piétiner pendant des minutes entières…

Alors qu’en fait j’avance, je trie, je range, j’ordonne et je balance le superflu, je donne, de l’amour, des conseils, des vieux livres, des fringues trop petites, de l’énergie… Mais aussi des ordres, des consignes, des réprimandes … et aussi des calins, des bisous, des tartes aux pommes et des blanquettes de veau…

En attendant de donner quoi de moi ? Quoi de vraiment moi ? Quoi de cette envie de rester là à pianoter des heures pour faire sortir tous ces mots, toutes ces phrases qui feront peut-être une histoire ou peut-être rien du tout mais qui seraient tellement plus à leur place sur du papier que dans ma tête en raz de marée – ras le bol - trop plein ?

L’impression de m’essouffler, de m’engluer dans ce surplus de pensées, de textes, de lignes pas écrites et qui engorgent mon cerveau et me pèsent sur le larynx, là où ça fait comme une maudite boule d’angoisse qui ne veut pas être avalée… Je connais trop bien cette lancinante présence au cœur de moi, qui ne se laissera dissoudre que dans les larmes… ou l’encre ?

Pouvoir enfin lui laisser le champ libre, allez, vas-y ma vieille, montre-moi ce que tu as dans les tripes, tout ce que tu dois me montrer depuis si longtemps qui bute à chaque fois sur une infime partie de quotidien, sur une bêtise de durée d’une journée qui n’a que 24 heures dont 8 dans les bras de Morphée…

Dis moi enfin pourquoi tu es là, en moi, ça fait combien de temps, déjà ? 15, 20 ans de latence, d’omniprésence, de ratures à mon esprit comme sur un brouillon d’écolier… Disons donc deux dizaines d’années, puisque ce soir je bois un coup à mes trente-huit, on peut bien avancer ce chiffre, car la trentaine ça ferait un peu « j’écris depuis que je sais lire… » ce genre de connerie qu’on entend parfois dans la bouche des écrivain(e)s trop pressés de rentrer à l’Académie Française ou d’avoir le Goncourt.

C’est pourtant vrai que j’aime raconter, écrire, me laisser mener par les mots vers des rivages inconnus, des terres vierges puisque planquées aux tréfonds de mon imagination, engendrées par la somme de mes émotions et de mes réflexions les plus anodines voire inconscientes, produits de mes lectures et de mes incertitudes face au monde qui m’entoure… Ou soustraction de mes expériences d’avec la multitude de personnes et de situation qu’il ne m’a pas encore été donné de rencontrer (si on peut rencontrer une situation ?) Ou division de la littérature tout entière par mon langage interne et propre à ma seule entité ?

Le nombre de formule est infini, ou plutôt indéfini, et heureusement !!!

Il resterait juste à savoir si cette prose, cette tentative de laisser libre cours à ma logorrhée interne et lui donner existence matérielle est valable, bonne, intéressante pour d’autres que moi-même.

Passés les bienfaits instantanés de l’écriture, qui libère cette angoisse et la laisse s’auto-détruire en une création (car rien ne se crée ni ne se détruit, mais tout se transforme, même les concepts), existe-t-il la possibilité d’en tirer quelconque usage ?

J’écoute souvent les émissions culturelles de France Inter, je lis pas mal d’hebdos qui vont presque systématiquement dans le même sens que ce que j’ai entendu auparavant, j’en déduis qu’il y a une sorte de pensée unique en France pour honorer tout écrivain(e) qui se lance comme étant (partiellement au moins) le renouveau de la littérature contemporaine. Les journalistes se demandent régulièrement si le roman est mort, comment vivent les écrivains méconnus, quel sera le phénomène littéraire de demain, si on va connaître les émois d’un nouveau Sartre ou les splendeurs d’une George Sand du XXIème siècle…

Et moi, dans cet univers fermé, où suis-je ? Ai-je le droit de penser avoir une place un jour dans un de ces papiers ? Est-ce là la motivation qui pourrait m’aider à franchir le pas ? Faut-il ce genre de tentation pour se lancer, ou l’envie d’écrire suffit-elle à justifier de chercher un éditeur ?

A la copine journaliste et auteure de bouquins pour enfants, qui me propose de me donner deux-trois adresses, je ne sais que répondre … Peur d’un œil étranger sur mes textes, doute du bien-fondé de cette démarche-là, manque de confiance en mon style ou la qualité de mes écrits ?

Plus sûrement et pragmatiquement, impossibilité de trouver le temps de tout dactylographier pour présenter les choses dignement, donner une forme à ces centaines de feuillets, mettre au monde quelque chose de présentable et digne d’être lu par un professionnel de la chose !!

Alors je me contente d’y penser, de me représenter mentalement le début de la tâche : faire des tas par année, alors on commencerait quand ? En 1980, année du premier journal intime ? En 1987, où l’amour a motivé l’écriture de dizaines de lettres et carnets ? En 2003, où j’ai enfin réalisé et pu exprimer que c’est écrire qui me fait comprendre ma vie, mon être et ma relation aux autres ?

Bon, une fois qu’on aurait décidé, on ouvrirait les boîtes en carton, les coffrets à lingerie et autres mallettes qui servent depuis tout ce temps d’écrin et de valise à mes gribouillages. Et là, comme l’été dernier où j’ai commencé au pif par 1990, se trouver confrontée au passé, aux émotions anciennes, aux amours mortes et aux naissances diverses… Il me faudrait plusieurs semaines pour réussir à enregistrer tout ça…

Et après, passés les larmes, les sourires et les nuits à se souvenir… Comment ordonner tout cela ? Par quoi commencer, de quelle structure étayer cette production ? Une petite voix me souffle que l’idée naîtra en relisant, en tapant sur mon clavier, que les pensées et les écrits trouveront leur utilité, leur puissance au fur et à mesure de la mise en forme informatique.

Reste donc, juste, à trouver le temps et l’endroit opportuns… Une fois dans la nouvelle maison ????

17 novembre 2006

Ainsi c’est comme çà la rage au cœur et la peur au ventre, la rage de l’incompréhension et la peur de tout perdre, parce qu’on ne s’est pas compris ou qu’on devine plus qu’on ne sait la mésentente, la fatigue et les émotions refoulées depuis trop longtemps.

J’ai mal, je pleure et je m’en veux, de ne pas avoir su te dire avant de mendier ces quelques paroles de tendresse et d’intérêt, je souffre de cette tristesse d’esseulée qui se perd et se noie dans les larmes que je croyais à jamais impossibles…

Pourquoi cette dureté, cet emportement devant ma demande, comment les mots blessants peuvent-ils avoir pris la place de toute la douceur que tu m’as apportée jusque là ?

Je ne comprends pas, je me débats dans une toile gluante de non-dits et de fausses sensations, j’ai peur que tout se brise, que les morceaux de notre histoire se détachent de nous et tombent tout d’un coup et pour toujours.

J’ai faim de toi, de nous, je t’aime et je ne supporte pas de te sentir blessé par mes attentes ou énervé devant mon manque de rigueur ou les fantaisies de mes enfants.

J’ai besoin d’air pur, de liberté et de grandes envolées, pour tenir face à la quotidienneté harassante ou pour construire ensemble un monde plus doux… Cet air salvateur depuis deux ans ou presque tu me l’as apporté au quotidien, me faisant rayonner et enfin reprendre goût à la vie.

Et puis voilà patatras tout est par terre ou presque, il faut se coltiner la réalité de celui qui est fatigué mais ne veut pas l’avouer, de celle qui frime de se penser prochainement réintégrée dans la vie socio-professionnelle…et des kids qui n’ont rien demandé mais sont là quand même, avec leurs vilains défauts et leurs géniaux bons côtés…

Encore une fois ils vont partir chez leur père avec un cartable lourd d’une semaine bâclée, moi je les regarderai prendre leur car ou le portail de l’école avec une grosse boule bien douloureuse en travers de la gorge, et pourtant le week-end passera et lundi sera vite là pour les retrouver et rattraper ces quelques dizaines d’heures perdues sans eux…

Je suis triste alors que ce devrait être la fête, on a enfin une bonne raison puisque j’ai réussi au concours, je suis même dans les 10 premiers sur plus de 500 candidats… Qu’est-ce que tu dis de çà ?… C’est bien.

OK. Alors je tente d’évacuer en écrivant, avant d’aller rincer mes larmes dans une bonne giclée d’eau et de me blottir dans tes bras, ceux de l’homme que j’aime et qui me protège de mes démons, mais qui m’a tant stressée aujourd’hui.

6 novembre 2006

Toute ronde, elle est apparue entre les branches des arbres, si pale et pourtant si claire dans son halo brumeux, comme une éclaircie dans une tempête de neige, comme un embrun qui raviverait les tons sombres d’un coup de suroît sur la côte sauvage.

Tout est froid, comme figé dans le début de l’hiver alors qu’on vient à peine d’entamer l’automne. Rien ne bouge, pas une feuille, pas un brin de nuage… Quelle est cette sensation étrange que la fin du monde est proche, que cette nuit peut-être tout va s’éteindre et recommencer pour une nouvelle existence ? Des êtres différents vont surgir d’outre-tombe, ou bien de la profondeur des océans, nous apprendre d’autres réalités, nous mener vers un bonheur dont nous n’aurions jamais suspecté l’existence sans leur apparition.

Tout à l’heure elle était rousse, puis quelques instants plus tard déjà blonde… A présent elle est presque albinos … Ne serait-ce ses grands yeux gris-noirs écarquillés, on pourrait la croire comme cette lapine pleine aperçue au creux du clapier chez la fermière avant-hier, elle aussi venue d’un autre monde ?

La préparation du repas puis les bavardages des enfants devant leur assiette de pâtes-jambon me sauvent d’un spleen que j’aurais bien laissé s’élever au rythme de l’astre, me soulevant de la plate réalité vers un univers flou de pensées volages, planantes et irréelles.

Les ombres chinoises des arbres du fond de la rue m’auraient servi d’échelle pour grimper jusqu’à ces mots interdits, trop inexistants puisqu’encore inexprimés…

Les fines branches du peuplier déplumé par la dernière tempête d’équinoxe auraient filtré les phrases échevelées de mon amertume, les aiguilles de pin raidies par le gel se seraient faites tricoteuses d’histoire à ne pas dormir, on aurait pu alors partir en voyage sous la couette et redécouvrir les douceurs de l’hiver quand le temps nous est donné de retrouver la chaleur de nos corps engourdis.

Mais il est l’heure de penser à regarder la pendule. Le temps ne s’est pas arrêté pour laisser libre cours à mes idées et il est déjà l’heure où je t’attends, impatiente de lire dans tes yeux le soulagement de passer la porte pour la refermer sur cette nouvelle journée de travail.

Je me fais des films sur les pensées qui sont les tiennes à l’heure où chacun rentre chez lui ou est déjà entrain de savourer la soirée en famille, ou de redouter une nouvelle nuit de solitude.

Je divague, de vision en rêverie… Les enfants ont fini leur repas et m’ont laissé la place sur la table de la cuisine… Les rayures de la toile cirée sont le parfait contraire de la vue offerte à la fenêtre : quadrillage coloré contre disque blanc sur fond noir… Sa bouche arrondie reflète mon ébahissement, mon étonnement à trouver les mots d’une façon aussi fluide pour exprimer cette douce tristesse de l’attente, ce tendre trop-plein de sentiments qui aimerait tant déborder une bonne fois et me laisser enfin libre de te consacrer toute mon énergie.

C’est un lundi soir banal de l’automne, la lune m’a rappelé depuis son coucher ce matin, quand je partais pour l’école et qu’elle nous souriait de l’autre côté du chenal, que toute cette vie est juste une grâce depuis bientôt deux ans.

jeudi 21 février 2008

Le 21 février 2008

Dans un mois le printemps, OK, ben ça sera bien, parce que cette fin d’hiver qui n’en est pas une vu les températures, moi ça m’use plus que de mesure… J’en ai un peu le trop-plein de toute cette douceur alors que les autres s’en donnent à cœur joie aux Antilles ou aux sports d’hiver.

Moi ce que je voudrais, c’est un bon feu dans la cheminée et plein de buée sur les vitres, un grand coup de froid quand on va chercher une bûche et après ta langue dans ma bouche et ton sexe en moi (ou l’inverse, enfin quelque chose de chaud, tendre et… ) pour me faire fondre comme la neige qui va pas tarder à tomber…

Mais non, à la place, on a des bourgeons dans les hortensias, des journées trop courtes malgré le jour qui rallonge, du boulot ras les tiroirs et un porte-monnaie plus vide que du temps des baby-sittings d’étudiante pour se payer une chaîne hi-fi ou la première paire de boots.

Et en plus pas le temps de se dire des mots tendres, ou pas envie, ou pas conscience que ça peut faire du bien, enfin bref, une vie de cons, quoi !

Et les petits qui rentrent de l’autre monde, du monde de l’autre, avec des idées géniales et débiles à la fois, comme passer sa journée sur la console portable ou se renseigner sur la signification de « Quo Vadis » …

Et moi qui porte en dedans toute cette envie d’écrire, que je réfrène, que je retiens, que j’essaie de comprimer sous une tonne de mailings, de coups de fils et de tchache avec la caissière ou la copine qui a eu le malheur de m’appeler pour une recette de cuisine… Je piaffe, mes neurones s’encrassent et je m’énerve à espérer une minute de magie dans une journée de routine.

En fait y en a même pas, des copines qui appellent pour faire des trucs ensemble, ou bien c’est pas le bon moment, ou bien c’est pas la bonne copine, ou bien rien du tout je délire toute seule à mon clavier car personne ne pense à moi, c’est sûr, en fait personne ne m’aime et pourquoi j’écris tout ça puisque personne ne va le lire…

Pfffh, comme je l’écrivais il y a quelques dizaines d’années, euh… oui, au moins deux … Je vais aller dormir je crois, c’est sûrement la meilleure façon de faire passer cette pilule-là, se reposer, laisser les rêves prendre les commandes et m’emmener au pays où tout est possible, où rien ne se passe comme prévu mais d’où je ressors toujours heureuse, que ce soit de me réveiller enfin d’un sale cauchemar ou de me souvenir d’un délice onirique … ou d’être tout simplement enlacée à mon amoureux…

lundi 7 janvier 2008

5 janvier 2008

N’ont que ça à faire, nous donner à croire que le monde est beau, facile, là, à portée de nos doigts fatigués, de nos mains fripées de trop d’étreintes, de nos membres raidis de toute cette attente vaine.

N’ont que ça en tête, nous faire penser que la lumière dorée de la ville qui se reflète dans le ciel bas et noir est le reflet de la magnifique réalité, la sublime merveille qu’il nous est donné de toucher si seulement nous nous en donnons la peine, si juste nous osons.

Mais nous n’oserons jamais, et ils le savent bien, c’est pour ça qu’eux peuvent jouer de nos chimères et laver leur conscience en des jeux illusoires de lumière et de cendres.

Nous sommes l’armée de l’ombre, soldats de plomb englués au réel de nos matins froids, de nos journées glauques, de nos soirées mortelles où nous croyons échapper à notre sort miteux en buvant jusqu’à la lie le fiel de leurs vies confortables.

Leur aumône nous avilit, leur tiédeur fausse nos vies, leur pitié nous assomme.

Ils nous donnent à voir des montagnes de biens, des tombereaux de pouvoir, des fleuves de plaisir… mais toucher, ne serait-ce qu’humer, ça ils se le gardent, bien jalousement, ne laissent que des bribes de sons et d’images parvenir jusqu’à nos âmes affamées, jusqu’en nos cœurs déjà maintes fois brisés.

Les lambeaux de leur jouissance frémiront parfois encore jusqu’à nous, assoupis par la faim, endormis dans le désespoir.

Leur faiblesse est dans le souvenir d’un homme qui jadis leur apprit le partage et l’amour, qu’ils s’empressèrent de bafouer de génération en génération, d’aïeul en petit-fils et à travers les siècles.

Maintenant, ils ont exorcisé ces siècles de croyance, d’obscurantisme et de frayeurs pour les remplacer par d’autres divinités, des totems en plastique et des poupées en celluloïd.

Ce soir en rentrant d’un bon dîner, à travers la campagne détrempée des pluies d’hiver.

Le ciel est jaune orange de trop de froidure et d’humidité mélangées, j’ai le cœur à l’envers de trop de bien-être indécent quand je pense à ceux qui n’ont rien, assis à même le bitume froid et noir de nos villes, alors que les chaumières vides ne demanderaient qu’à faire renaître leur âtre dans ces yeux larmoyants.

Une grande tristesse s’empare de mon cœur, un malaise de privilégiée, une larme de trop plein vient s’écraser entre mes cils de femme occidentale.

N’ont que ça à nous faire croire :

- que la vie est facile – belle

- que le monde est tranquille

- que les hommes sont bons et égaux.

Alors que chacun sait bien au fond de lui comme du bout des lèvres que rien n’est acquis, que tout est dur et que la vie est âpre comme la piquette du grand-père.

Mais aussi qu’elle vaut la peine, pour les petits plaisirs comme pour les grands moments de solitude ou de souffrance, pour l’amour et la gloire, pour la tristesse et le désespoir.

Que nos enfants nous pardonnent cet égarement qui a pu parfois nous porter à penser qu’ils feront mieux que nous, qu’ils rattraperont nos fautes et sauveront nos âmes de vils pêcheurs.

Nous sommes maudits, pauvres terriens en mal d’une île déserte où s’abandonner enfin, pauvres marins qui cherchons depuis l’instant de notre naissance à retrouver le confort de notre mère créatrice, mare nostrum.

Nous sommes aussi bénis, mais ne le savons pas – ou pas assez – nous qui chaque jour pouvons contempler le même astre à son lever, le même ciel où vont les oiseaux, les mêmes étoiles qui nous contemplent depuis leurs années lumière de distance.

Nous nous croyons élus, nous ne sommes que choisis, par qui et pour quoi, un jour, l’ultime, nous le saurons peut-être.

En attendant, croire, faire croire, vivre et survivre, pour le meilleur, le pire…

En se disant qu’ils n’ont que ça à faire, ceux qui nous ont mis là, et qu’ils se marrent bien à nous regarder essayer une fois encore de trouver le sommeil avant de retenter demain encore et puis les autres jours aussi, après demain, le siècle prochain, de donner un sens à tout ça.

Et ils doivent aimer ça, puisque chaque matin, on se réveille encore, les rêves s’évaporent et c’est reparti pour un tour, pour un jour, pour toujours…

En attendant, je t’aime, mon amour…

mercredi 12 septembre 2007

26 août 2007

Une dernière pensée avant l'extinction des feux, tous ces mots lus, aperçus, ressentis, happés et en phase de désertion cérébrale à présent ... font fermenter en moi l'envie de m'y mettre à mon tour.
Les idées bouillonnent et se pressent à mon esprit, lueurs de prémices d'histoires à raconter, à enfanter ; personnages qui courrent, graciles, éphémères et encore virtuels, phantasmes de vie passée ou rêvée, d'espoirs inaboutis ou bribes d'existence entraperçue aux détours d'une balade à vélo.

Entre les fougères et les pins qui tapissent le sol du sous-bois de leurs aiguilles roussies, quelques brises et légers mouvements d'air estival me mènent loin d'ici, loin de maintenant, alternativement et tout en même temps.
Qui a franchi ce gué entre deux bosquets d'aubépine, quelles mains ont cherché sous les frêles dentelures vertes le joyau rouge qui redonnera ses forces au Chouan épuisé ou à la fille de ferme anéantie sous le dur labeur d'été ?
Quel animal a laissé là un brin de sa fourrure au sortir d'un taillis, harcelé par la meute du seigneur qui le rattrape inexorablement ?
Quel jour funeste les rayons du soleil ont-ils percé la ramure des pins maritimes et des châtaigniers centenaires pour auréoler de leur lumière trop vive la blessure du chevreuil aux abois, la toilette hâtive de cette Soizig négligée, le repos minuté de ce Yannick apeuré ?

Combien de soirée comme celle-ci, douce et comme attentive, aux lueurs calmes de fin d'été ? Quelle est la génération de ramiers qui s'ébroue dans le chêne vouté luttant infiniment pour sa place adossé au talus ? Depuis quand les "crampouez mouzig" aux bords de tous les chemins bretons ?
Quelle fut la première aube sur l'étang encore assoupi où la biche vient humer les derniers soupirs de la nuit entre les écharpes de brume ?

J'aurais aimé être là à chacun de ces instants, à chaque lever de lune comme à tous les crépuscules, et cette étrange sensation d'en avoir été à chaque fois, nichée au creux des branches ou simple particule de cet air pur, m'envahit à nouveau et me donne à penser, à croire, à être convaincue : j'y étais, j'ai tout vu, chaque jour, à chaque instant, toujours, et pour la nuit des temps ...

La présence physique n'est qu'un leurre, une utopie bien trop réaliste pour se laisser happer par notre vile condition d'humain.
Nous sommes en chaque parcelle de vie sur cette planète, représentés à l'infini en chaque cellule, quoique nous fassions, quelque soit notre naissance ou notre destinée.

Aimer la vie nous donne à nous multiplier, à nous diviser pour connaître à chaque instant de l'invisible tout et du trop flagrant minimum.

samedi 7 juillet 2007

C'est pour de bon ?

Salut à toi, internaute !

ça y est, j'ai fait l'effort, passé le temps qu'il fallait, enfin pris mon courage et mon clavier à deux mains, chaussé mes lunettes et anéanti mes dernières réticences : j'ai créé mon blog !
Bon, d'accord, ça n'est encore qu'une petite page de rien du tout parmi les millions de feuillets qui volètent de par le vaste réseau à l'instant même, vus, lus, aperçus par autant d'yeux, de cerveaux, d'individus ... j'en ai des frissons rien que d'y penser.

Mais bon, j'ai réussi à faire fi de tous les obstacles que j'avais laissé se dresser contre ce projet incertain, et j'y suis : en parallèle de l'existence dont m'ont fait cadeau mes parents, voici que commence ma seconde vie, ou plutôt qu'elle va pouvoir connaître sa naissance à elle, sa reconnaissance : je veux parler de ma vie sur le papier, des milliers de phrases, pensées, idées et émotions couchées à l'encre bleu-noire sur toutes sortes de cahiers, blocs et autres notebooks.

J'aimerais partager mes écrits avec toi, te laisser à lire les pensées qui me traversent, m'animent et me font exister depuis plusieurs années, quelques décennies même, puisqu'à l'époque de mon arrivée sur Terre les humains n'écrivaient encore qu'avec un stylo ou une machine sur du papier.

J'essaierai donc ici de retranscrire ces textes, une sorte de journal intime, mon "deizlevr" à moi.