mercredi 18 mars 2020

18.03.2020 - journal officiel et compagnie

Je suis  passée de l’arpentage d’archives départementales à pistage d’infos sur site préfectoral ou étatique.
Au lieu de divaguer parmi les traces de vie de mes aïeules, de table décennale en arbre généalogique, j’erre maintenant d’un arrêté à un décret, d’une étude épidémiologique à une circulaire… et j’hallucine !
Il y a de tout dans la vie, mais là je m’égare dans les méandres des décisions gouvernementales ubuesques. De l’autorisation de mise sur le marché de semences agricoles (ouhlala 37% des maïs viennent de chez Monsanto, 28% seulement de France, les 72% restants étant partagés entre USA donc, Allemagne et Suisse !)… aux nominations à des postes divers et variés de l’administration, du gouvernement  ou de l’armée… ça  fait un paquet de circonvolution dont le citoyen de base n’a pas idée.
À part la nomination d’un poète au titre de « conseiller technique discours » du cabinet du premier ministre, j’ai pas vu beaucoup d’infos réjouissantes parmi toutes les décisions actées ces derniers jours. Ces listes d’arrêtés, décrets et règlements me donnent le tournis en fait.

Et  pourtant la vie la vraie continue ses envolées lyriques ou se raclements de basse fosse.
Et les oiseaux commencent à chanter comme tous les matins. Mais comment fait donc la Nature qui n’a à ma connaissance pas besoin d’un parlement ou d’un greffier pour reproduire et améliorer sans relâche les mécanismes savants de toutes ses beautés ? Les hommes ne peuvent-ils pas juste s’asseoir et regarder, comme les Indiens d’Amérique (Nord et Sud) ou les aborigènes australiens ?
S’asseoir et regarder.
Regarder et se taire. Laisser l’air et la lumière guider leurs sens, apaiser leurs colères et soigner leurs désirs perdus.
Contempler et faire un, particule et maillon d’une chaîne infinie d’unité magnifique.
Au lieu de bétonner, arracher et  souiller.

Allez, je retourne en  chemin creux trinitain, entre les murets de mon enfance et les aubépines en  fleurs.  Ma grand-mère m’appelle sur le chemin des douaniers, où la lumière est belle au lever sur le chenal, chatoie sur les façades encore alanguies des villas et reflète sur la mer toute la beauté du ciel.
Cette puissance de calme et de tranquillité après les tempêtes et les déluges de l’hiver apaise mes angoisses, ressource les lueurs d’espoir semées en contrejour du monde.
La chance d’être ici, patiemment assise au creux d’un rocher ancestral ou sur les marches de Ti-Guard, marchant d’un pas vif ou contemplant la baie, le bonheur d’être en vie, les vagues de ressentis, d’émotions et d’envies me soulèvent d’une profonde gratitude.
Mais quand même Manu, Ed et les autres, vous avez pas l’impression de rétropédaler les mecs ??

mardi 17 mars 2020

réveil post-discours présidentiel - le chef des armées a parlé


Nous sommes en guerre. Il l’a dit combien de fois ? Et ça veut dire quoi ? l’armée dans la rue ? les blindés, les treillis ?
Cette nuit à 4h33 mon petit garçon fait un cauchemar et je réalise toute la rhétorique employée hier soir par le président.
L’horrible impression d’assister depuis toujours à une représentation morbide.
De noter depuis toujours ce qui nous prépare au pire. Toute ma vie, pour toujours.
Gamberger écrire sourire, toujours éviter le pire, mais combien de temps ?
Je m’en veux et je m’en fous
Toutes ces tentatives ces soupirs, pour qui pour quoi cela n’a plus d’intérêt.
Il faut dire, lire, vivre
Gabriel Garcia Marquez a raison, rien n’est plus beau que raconter
Milan Kundera l’a dit, l’homme est insoutenablement léger.
Et tous les auteurs, toutes les écrivaines, nous l’ont susurré, hurlé démontré, rien ne vaut les mots pour mettre monde nos plus sombres attraits.
Je pleure et je ris de ce désarroi, enfin la lumière sur toute cette colère
Une jonchée de fleurs sur un sol en ruines
Nos rues nos allées parsemées des confettis de carnavals passés, de fêtes avortées, des mille et uns destins happés, balayés d’une main.
Si demain tu pars, tout seul au combat, je m’en voudrais je crois de ne pas t’avoir fait l’amour, lentement et en silence, encore une fois et pour toujours…
5h06, 17.03.2020, dernière nuit avant le couvre-feu ?

Et puis, renonçant à lutter face à la lucidité qui me tient à présent bien éveillée, je visionne le  ministre de l’intérieur parlant après le président, et je comprends. C’est vraiment la guerre.

lundi 16 mars 2020

16.03.2020 – après trop de larmes, merci Jean-Louis Aubert



lundi matin, en attente des infos sur une menace de confinement, à l'écoute de pensées ondoyantes dans l'air bizarre  

Par où commencer ? les mots les pensées, ou les contingences procrastinées ?
Les êtres aimés ou le quotidien national d’un pays confiné ?
Les phrases importantes, celles qui trottent et bougonnent en moi, ou les bribes d’infos, le buzz vrombissant ?
Tiraillement qui pique, froissement d’envies et crainte d’errements absolus.
Et les premiers oiseaux qui m’appellent dehors.
Et l’air vif sûrement, qui accompagnera nos quelques sorties au jardin, parler par-dessus le grillage aux voisins ahuris de ne pas être partis au boulot ce lundi matin : mais qu’est-ce qu’on va bien pouvoir faire quand la maison sera rangée, le garage nickel, les vitres pimpantes, le linge au cordeau dans les armoires, les placards rutilants d’un printemps à peine éclos ?
Est-ce que ça va durer ? comment vont vivre nos vieux parents ? qui va occuper nos mômes épatés de si longues vacances, ennuyés de plus de potes plus de récré ?
Et l’espoir renaît d’une aube de rassemblement par la pensée, d’une conscience collective qui efface les misères de la société, hop, magnifique éponge aux mains des plus aimants, splendide raclette dégommant les avanies, hop, dehors les miasmes des fachos, essuyés net les relents de populisme et les mauvaises odeurs des contempteurs et autres méprisants du réel.
Mais aussi je sais les mirages de l’isolement, cette fâcheuse tendance à idéaliser quand on est loin du cœur, loin des caresses, loin des parfums discrets…
Je pose ici mes craintes et mes utopies, mes vagues à l’âme et mes envolées aux nues, mes horizons de petit matin calme, mes folles soirées de hargne ou de vertige.
Puissiez-vous y puiser les forces de comprendre notre monde et nous entraîner vers le bonheur.
Prenez soin de vous, restez entiers.