mardi 14 décembre 2021

sur le chemin, en allant vers Maria


 

7 novembre 2019

Le cerveau qui commence à pianoter dès cinq heures.

Les contingences du quotidien qui reviennent prendre leur place dans la boucle de mes pensées, s’intercalant avec arrogance entre les mots, les phrases, les personnages qui tournent eux aussi patiemment en moi depuis tant d’années.

Reprendre  son souffle.

Ne pas  négliger la petite douleur à l’avant-bras droit, récurrente depuis que j’ai troqué la souris du cabinet comptable pour celle de mon laptop, les animaux de laboratoire sont bien  moins contraignants que les bêtes nomades, j’aurais dû le savoir et m’entraîner un peu plus souvent à la dactylo sauvage…

Reprendre la main  sur le fil de l’histoire.

Ne pas perdre de vue le plan, les descriptions, aller chercher l’inspiration là où je suis sûre qu’elle se cache, sans présomption d’illégitimité, en toute quiétude. C’est dur. Les visages les situations les paroles vrillent au-dessus du champ de bataille, je suis faite de cinquante ans et demi de regards, d’écoute et de pleurs, rajoutés aux décennies des aïeules qui virevoltent dans mes veines ça me donne le tournis…

Et pourtant j’avance, le chemin est toujours celui de mon enfance, je tourne à droite pour longer la maison où est née Mamie et hop me voilà dans mon pays préféré. Le paludier vient de déclarer la naissance de sa troisième fille, entre celle du meunier et...

vendredi 3 décembre 2021

retour à l'origine - naissance de "Maria"

2 décembre 2021 – en revenant de Kerbihan

plutôt beau il fût, ce jeudi qui aurait pu être dans le gris

 

 

Devant ce bateau dans la lumière, j'ai pensé à Denis. Tous deux, le pote et le canot, face à l'adversité, contre vents et marées... du jaune poussin sur fond de baie angoissée, Méaban qui peine à émerger entre ciel noir et nuages foncés, et nous qui marchons sur le sentier, Caro ma cop's des jours heureux, des sourires malgré la tristesse, des regards chargés de promesse de jours meilleurs.

Tout ça et plus encore, la vie qui passe, les soubresauts de l’âme, les livres à lire et les potes à accompagner sur un chemin de douleurs ou une ascension chaotique…

 

Puis, rentrée maison, les images de Salt Whistle Bay, Mayereau, St Vincent & the Grenadines, où nous avons créé une vie, ou plutôt trois, l'enfant, son père et moi, à nos débuts, 30 years ago. 

Merci Alex Croisières Grenadines pour cette vidéo de drone survolant l’anse magique, puis Bruno pour l'échange au sujet de la réception (étrange simple et tellement émouvante) du premier exemplaire de ‘Maria’ :

 

Moi : pensées pour Denis, ce bateau jaune devant la plage de Kerbihan, je ne sais pourquoi, j'ai pensé direct à lui

-       C'est peut être l'ancien bateaux de Dji, Il était revenu seul de Houat Finale mémorable chez Jégo

-       Et puis ce petit point de couleur ds le gris entre 2 eaux C'est bien lui Merci

 

Moi : c'était magique, on a attendu avec Caro que la lumière revienne sur le bateau. Quelle belle balade 🙂 ! à la fin, sous le chemin de la Hune, mon éditeur est arrivé avec le livre tout chaud sorti de chez l'imprimeur, quel hasard, on était juste sous la maison où elle est née... je n'ai pas fait de photo, mais juste avant, celle-ci :

 

-          Merci magnifique [...] Bonne sensation d'avoir un livre chaud comme un croissant au matin l'avenir et le lendemain s'annoncent bien et moelleux

 Moi : merveille à partager sans modération... pourvu qu'il plaise 🙂

 -       Incroyable hasard c'est bon signe

 Moi : impression de boucle bouclée, le ciel était changeant un peu frais mais si pur... l'entente avec mes racines, l'onde légère parfois si tumultueuse, la vie qui va et vient, chal a dichal

 

Et puis le soir, relatant à mes enfants ce hasard magique et aussi suite logique et universelle de nos vies, les frissons et les larmes me viennent face à cet éternel recommencement, cette perpétuelle naissance. La mienne, celle de Maria, la vivante du siècle passé et celle qui va naître bientôt entre les mains de mes lecteur-trices... et qui est née en cet après-midi de décembre, jour de la Ste Viviane, amie-fée merveilleuse qui éclaire mon chemin, aussi, depuis plus de trente ans. 

Et le dernier mot pour Denis, tiens bon vieux pote ! 

        - La vie c'est comme dit Denis En 2 lettres ? comme un jeu de mots croisés


 Voilà. Merci

mardi 5 octobre 2021

digressions nocturnes


 

Une femme assise.

Une femme assise qui lit.

Un bouquet de fleurs jaunes et blanches dans un vase vert, plutôt carré. Non, rectangle. Vert.

Une femme accoudée à la table, assise sur un fauteuil jaune.

Une femme pensive en jupe noire et t-shirt rouge, col en V.

Une femme, jambes croisées, brune au teint halé.

Une femme qui pense, accoudée à une table rose pâle, la lettre posée devant elle.

Son reflet dans le miroir derrière elle, et un autre vase, de fleurs rouges celui-là.

Une femme triste accoudée à une table vide sauf un vase et deux losanges gris.

Des tableaux au mur, ou est-ce la mise en abime du reflet dans le miroir.

Et le bouquet dans le vase vert est beaucoup plus gros et plein de branchages verts et autres fleurs roses et grises.

Des traits des angles et quelques rondeurs, du noir et des couleurs.

Digression sur une œuvre de Matisse, et tant de choses à dire encore avant que l’ordinateur s’éteigne.

vendredi 1 octobre 2021

Première pluie d'octobre



Aujourd’hui, avant toute chose, écouter mon corps, mes sensations, la musique de l’univers.

Voilà ce qui me vient à l’esprit en ouvrant mon ordinateur, à la vue de ce collage de Matisse qui s’affiche en fond d’écran – passée la petite frayeur d’un redémarrage laborieux, le temps que je me souvienne l’avoir complètement éteint hier soir.

Recherchant le fichier image dans les tréfonds de l'arborescence informatique pour l’insérer ici, je suis intriguée par son titre et me pose d’autres questions. La Tristesse du roi, 1952. Je voyais un musicien, une danseuse, un mouvement de grâce parmi des pétales de fleurs printanières ou de feuilles tourbillonnant au cœur d’un été sec et venté, une fusion à l’univers, le lien entre les arts et la nature, une mère élancée vers les fluides merveilles offertes à son être rivé au sol par l’enfant qui l’enlace. Intriguée, j’y ressens à présent cette mélancolie, jetée par le personnage vert comme des pleurs qu’on voudrait disperser, façon de transmettre son émoi pour recevoir en retour un apaisement, une douceur dont on ne sait plus trouver la source.

Ou est-ce dans l’autre sens qu’il faut lire ce tableau, les feuilles dorées s’envolant du bord inférieur droit en une arabesque délicate qui contourne les artistes, danseuse concentrée sur ses mouvements, musicien plongé dans sa mélodie, tous deux tentant de leurs gestes graciles de laisser leurs âmes porter talent et énergie vers celui qui les reçoit, guettant d’une main grand ouverte les pépites d’émotions portées par l’air ?

Que tient-il dans le giron de ses jambes repliées, alors ? N’est-ce pas la tête blonde d’un enfant assoupi ? Je reste à méditer un instant, dehors le chat miaule (lui aussi de tristesse ?) face au jardin trempé, s’abritant comme il peut sur la terrasse brillante de la première pluie d’octobre. Il ne répond pas à mes caresses, si ce n’est pour me signifier que tout cela, le gris du ciel, un nouveau chien chez les voisins qui le nourrissent habituellement, ma farouche obstination à ne pas le laisser entrer par peur des puces et des allergies de mes enfants, tout cela, ce n’est pas un bon début de journée pour lui.

 

Kerbrezel, 1er octobre 2021